Le Maghreb dans son contexte géographique, historique,  socioculturel et littéraire.

Par Rym Kheriji Benaissa

            Qu’est-ce que le Maghreb ? Depuis la colonisation française et malgré sa consonance exotique, cette appellation entre dans le langage courant et fait référence à l’ensemble des trois pays situés au nord-ouest de l’Afrique : le Maroc, l’Algérie et la Tunisie. Le Petit Robert des noms propres révèle l’origine arabe du mot signifiant l’«endroit où le soleil se couche » et délimite le territoire qu’il désigne à la région s’étendant « entre la Méditerranée et le Sahara, l’océan Atlantique et le désert de Libye ». Quant au Petit Larousse, il met l’accent sur l’opposition, toujours d’origine arabe, entre le Maghreb ou « le couchant » et le Machrek ou « le levant ». De par sa définition même, le Maghreb est donc l’endroit où le soleil se couche, c’est-à-dire l’Occident. Par ailleurs, il fut un temps où cette partie du globe était une province de l’empire romain d’Occident. Pouvons-nous pour autant l’apparenter à l’Europe occidentale ? Une autre opposition cardinale nous en empêche : le clivage Nord / Sud. Il nous est dès lors difficile d’affirmer si le Maghreb est la porte qui ouvre sur l’Orient ou le passage qui donne sur l’Occident. Ces clichés, en montrant la relativité des points de vue, mettent en relief l’importance stratégique de cette partie du continent africain.

            L’Afrique du Nord (« l’autre » appellation du Maghreb) a connu depuis longtemps un destin commun. Peuplée à l’origine d’une même ethnie (les berbères), elle a subi à peu de choses près les mêmes envahisseurs, les mêmes périodes de gloire et les mêmes défaites. Les Phéniciens, les Romains, les Vandales, les Arabes et les Turcs ont conquis successivement presque la totalité de ce territoire et ont exploité aussi bien ses ressources naturelles et humaines que les avantages qu’il offre aux échanges commerciaux. Ces différentes occupations n’ont cessé de l’enrichir tout en le modifiant. En outre, ces colonisations se sont déroulées pour la plupart sous le signe de l’assimilation avec les populations autochtones qui ont obéit tour à tour aux différentes lois, cultures et religions qui se sont imposées à elles.

Lorsqu’en 1830 la France frappe aux portes de l’Algérie, la civilisation arabo-musulmane a, avant même l’emprise ottomane, définitivement conquis les maghrébins. Mais « 1830 ne touche pas l’Algérie seule ; les Etats voisins en subissent immédiatement le contrecoup »[1]. Les traités de protectorats signés avec la Tunisie en 1881 et le Maroc en 1912 ne créent pas de véritables surprises et semblent d’emblée sonner le glas de la présence française en Afrique du Nord. Les maghrébins s’unissent dans un élan de solidarité pour arrêter la plus courte hégémonie de leur histoire. Les indépendances successives mais non éloignées dans le temps (1956 pour le Maroc et la Tunisie, 1962 pour l’Algérie), se font donc l’écho d’une colonisation fragmentée. Le château minutieusement construit par une France toujours soucieuse de ne pas être en reste par rapport à ses voisins européens (Angleterre, Hollande, Italie), s’effrite rapidement aux lendemains de la seconde guerre mondiale et de la guerre d’Indochine. 

            Avant de quitter le grenier de Rome, les Français ont toutefois laissé des marques indélébiles. Nonobstant la ségrégation qu’ils ont dictées aux petits barbares d’Afrique du Nord, ils créent, tout comme leurs illustres prédécesseurs, une infrastructure servant leurs desseins d’exploitants et d’explorateurs. De plus, ils accélèrent l’entrée de ce territoire dans le XXe siècle industriel et capitaliste dont ils sont les représentants. La stagnation due en majeure partie à la présence ottomane est brutalement secouée par l’incursion de la notion de progrès telle que la conçoivent les Européens de l’époque coloniale. Ce processus ne va pas sans quelques problèmes d’adaptation des populations autochtones. La décolonisation n’ouvre-t-elle pas la voie à toutes sortes de revendications ? Notamment au désir de rétablir le courant naturel de l’Histoire du Maghreb en niant tous les apports de l’Occident ? Le questionnement sur le passé et le devenir du Maghreb reste inachevé. Le champ d’investigation s’ouvre sur de trop nombreuses problématiques et malgré d’incessantes études, le sujet n’est pas encore épuisé. Notre ambition n’est donc pas l’exhaustivité ou l’érudition, mais l’évocation de certains points incontournables pour la connaissance de cette région. En outre, n’ayant aucune formation d’historienne, de géographe ou de sociologue, nous nous excusons d’avance pour la naïveté ou la subjectivité de nos propos. Nous tenterons dans ce qui suit de présenter le cadre spatial d’une région en constante mutation avant de remonter le cours du temps pour rappeler les étapes importantes de la période coloniale et post-coloniale. Ensuite, nous évoquerons les principales caractéristiques socioculturelles contemporaines engendrées en majorité par la période coloniale. Enfin, nous présenterons la littérature maghrébine en mettant l’accent sur deux de ces aspects les plus marquants selon la critique, à savoir le bilinguisme et l’acculturation.

Essai de définition territoriale :

Depuis l’avènement de la colonisation française, on entend par Maghreb un ensemble de trois pays de superficies largement différentes. La Tunisie comprend ainsi 164 150 km2 pour une population avoisinant aujourd’hui les dix millions d’individus. Par contre, l’Algérie dont le territoire s’étend sur 2 381 741 km2 (environ 15 fois plus grand que celui de la Tunisie), abrite, en 1993, vingt-sept millions d’habitants. Le Maroc dont la superficie (710 850 km2) représente le tiers de celle de l’Algérie, comporte une population presque équivalente : vingt-six millions en 1993[2]. Situé au nord du continent africain et au sud de l’Europe dont il est séparé par la mer Méditerranée, appelé par les arabes «al-Djazirat al-Maghrib “la presqu’île du couchant”», le Maghreb présente dans un premier temps une unité géographique qui justifie peut-être les différentes tentatives unionistes réitérées sans véritable succès depuis les premières dynasties arabes. Ses frontières naturelles, la Méditerranée au nord et à l’est, l’Atlantique à l’ouest et le Sahara au sud et au sud-est, en font une véritable plaque tournante reliant les quatre points cardinaux. En outre, grâce à la longue chaîne de l’Atlas qui s‘étend du Maroc jusqu’à la Tunisie et qui sépare le littoral méditerranéen du Sahara et de l’Afrique subsaharienne, la nature contribue d’autant plus à l’unification du territoire. Les frontières naturelles de ce dernier ne constituent cependant pas un rempart infranchissable puisque sa position stratégique au sein de la communauté méditerranéenne justifie les vagues de colonisations successives qui n’ont fait que favoriser la distinction entre littoral et intérieur des terres. D’un pays à l’autre, les différences apparaissent en effet au niveau de cette distinction qui explique aussi bien les changements du relief, que celles du climat ou de la population.

La notion de frontières est au Maghreb, comme dans les autres pays arabes, l’objet de plusieurs polémiques. Elle est aussi déterminante dans les relations inter-régionales. Les limites instaurées par la dernière colonisation en date sont en effet constamment remises en question. Les gouvernements maghrébins indépendants les considèrent dans un premier temps comme purement aléatoires et artificielles. Les anciennes provinces ottomanes ne sont-elles pas redessinées à leur propre goût par des Français soucieux de préserver leurs intérêts ?

« La colonisation devait produire à long terme deux effets récurrents qui constituent la plus forte entrave à l’unité maghrébine. Le premier est la constitution d’élites nationalistes d’origines fort diverses dans chacun des trois pays (…). Le second élément fut le respect des frontières laissées par les Turcs dans le nord du Maghreb, avec en revanche un découpage typiquement colonial et arbitraire dans le sud et au Sahara. De graves conflits allaient s’ensuivre, depuis celui qui eut lieu sur la frontière entre le Tchad et la Libye (accords Laval-Mussolini) jusqu’à celui du Sahara occidental espagnol, sans oublier tout ce qui empoisonne les relations algéro-tunisiennes (la borne 233), algéro-marocaines (Tindouf)… »[3].  

Les Turcs ne se sont aventurés ni au sud de l’Atlas ni au Maroc qui les a repoussés. Mais bien avant eux, les Romains et les Arabes ont divisé le territoire pour des raisons administratives évidentes vu l’étendue de sa superficie :

« Le Maghreb est depuis deux millénaires divisé en deux ou trois blocs relativement homogènes : la division en Mauritanie tingitane, Mauritanie césarienne et Afrique proconsulaire de l’époque romano-chrétienne couvre à peu de choses près les mêmes limites que l’Ifrikya (Tunisie élargie au Constantinois) et le Maghreb (Maroc) arabo-musulman »[4].

Dans ces deux cas, les frontières sont purement symboliques puisque une seule puissance règne sur le Maghreb. Les frontières abstraites au sens contemporain du terme apparaissent donc dans cette région avec les Français. Les lignes de démarcations purement théoriques accusent alors une différenciation dont les germes ont déjà été semés. Avec elles, d’innombrables discordes se développent entre les nations depuis la reconnaissance sur le plan international de leurs autonomies. De la guerre fratricide ayant pour adversaires les marocains et le Polisario, en passant par les joutes politiques et parfois militaires opposants les chefs d’Etats, la question est sporadiquement mise en veille jusqu’à nos jours. Même la création en 1989 de l’Union du Maghreb Arabe ne l’a pas réglée définitivement. L’union des cinq, incluant deux autres pays concernés par le litige des frontières (la Mauritanie et la Libye), laisse-t-elle pour autant entrevoir un début de solution au « cadeau empoisonné » des Français ? L’actuelle « entente politique » des pays du nord de l’Afrique permet néanmoins de délimiter clairement leurs territoires respectifs malgré l’enlisement du problème du Sahara occidental.

            En général, la revendication,  même légitime, d’un territoire par une nation est déterminée par les atouts qu’il présente. Le Maghreb est une région méditerranéenne à climat tempéré et humide sur le littoral et sec ou aride à l’intérieur des terres. Si l’agriculture bénéficie de conditions favorables aussi bien sur le plan climatique qu’humain, elle peut produire des récoltes conséquentes. Sa principale richesse ne réside cependant pas dans son sol mais dans son sous-sol. L’exploitation d’importants minerais (phosphates, fer, zinc, plomb) et de gisements de pétrole et de gaz (surtout en Algérie) constituent la majeure partie de ses activités industrielles. Les trois pays respectifs bénéficient de ces richesses avec des fortunes différentes ce qui explique sans doute un bon nombre de leurs désaccords. Si l’on considère par exemple le cas de l’Algérie qui est somme toute la mieux lotie parmi ses voisins, on pourrait se demander si ses réserves de pétrole et surtout de gaz sont une manne ou un paralysant pour son économie. En effet, tous les efforts de la politique étatique étant concentrés sur ces sources naturelles, d’autres secteurs tout aussi importants sinon plus sont délaissés. Par conséquent, la plupart des crises connues depuis l’indépendance sont tributaires des aléas du marché mondial. Ces crises affaiblissent le pouvoir central de l’Etat dans la mesure où l’incertitude plane quant à la relance économique. Chadli Bendjedid est le premier président à vouloir réformer la politique de développement de son pays. Mais cette entreprise vient à la fin des années soixante-dix et tarde à porter ses fruits. Le Maroc qui « recèle » quant à lui dans son sous-sol « les plus riches réserves du monde »[5] de phosphates, privilégie tout comme la Tunisie d’autres secteurs. L’agriculture et le tourisme sont pour ces pays une source de revenus appréciable. Par ailleurs, la Tunisie développe également l’industrie alimentaire et le textile contrairement au Maroc qui voit ces domaines rester des activités à peu près artisanales. La manière dont les ressources naturelles sont exploitées n’est donc aujourd’hui plus un point commun aux différentes régions du Maghreb. Le temps des littoraux transformés en comptoirs de commerces ou des plaines semées de blé pour nourrir Rome semble définitivement révolu. Des différences naissent, des spécificités apparaissent et ce, malgré les efforts d’union. L’uniformisation et l’alignement ne sont plus possibles car le Maghreb a effectivement suivi la voie tracée pour lui depuis le XIXe siècle.

            Des différences supplémentaires émanent d’un autre élément géographique que l’on pensait unificateur : le relief. La présentation du Maghreb comme un territoire unifié grâce à sa géographie peut sembler fort éloignée de la réalité. Le relief, beaucoup plus accidenté au Maroc et en Algérie, se présente sous forme d’alternances de régions montagneuses, de plateaux ou de plaines, de steppes et de déserts. En Tunisie et en Algérie, la progression du nord vers le sud révèle ainsi des paysages radicalement différents. Le Maroc est quant à lui préservé du Sahara par la disposition en diagonale de ses chaînes de montagnes.  Il est constitué aux deux tiers de plaines bordées au sud par le haut Atlas, à l’ouest par l’océan Atlantique, au nord par la mer Méditerranée et à l’est par le moyen Atlas. Son relief, considéré comme « très diversifié », l’isole de ses voisins :

« Parmi les pays de l’Afrique du Nord, le Maroc se distingue à la fois par l’altitude plus élevée de ses montagnes et par la remarquable extension des plaines et des plateaux. Le Haut Atlas occidental compte plusieurs sommets dépassant quatre mille mètres, dont le djebel Toubkal (4 165 m) qui est le point culminant de toute l’Afrique du Nord »[6].

Les montagnes du Rif séparent en outre le cours littoral méditerranéen du reste du pays. Encadré de montagnes et d’étendues maritimes, le Maroc ressemble à une sorte de spirale. Nous ne retrouvons pas ce mouvement circulaire dans les deux autres pays. Ces derniers (et surtout l’Algérie) présentent une disposition horizontale dans l’alternance des reliefs. Le nord étant un littoral de type méditerranéen est séparé du sud saharien par la dorsale de l’Atlas. Mais les montagnes de l’Aurès viennent orner le sud algérien de leur monumentale splendeur brisant ainsi la monotonie du paysage désertique. Contrairement à d’autres chaînes montagneuses, l’Atlas présente donc une disposition fragmentée, à l’image du territoire qu’il traverse. Le fantasme d’unité géographique est donc vite évincé par une réalité physique beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît de premier abord. Les mutations de la géographie humaine et économique découlent ainsi en partie de ces différences physiques de l’espace concerné. Nous renvoyons ici à la partie consacrée au paysage socioculturel où nous développons plus amplement le lien étroit entre conditions géographiques et mutations sociales. L’histoire enfin, nous explique à quel point le terrain est favorable aux différentes modifications qui lui ont été apportée.   

Des stratégies coloniales aux tâtonnements de l’indépendance :

            L’histoire du Maghreb, de l’avis même des spécialistes, est marquée par sa complexité. Cette dernière dépassant largement le cadre matériel et l’objectif de ce travail, tout effort de schématisation est en l’occurrence superflu. Nous nous penchons donc directement sur les faits marquants de la « période française » sans malheureusement nous attarder sur la spécificité de l’ambiance politique et sociale qui l’a favorisée. Chacun des trois pays du Maghreb a vécu sur un mode différent la colonisation française. Ni les dates des invasions (la prise d’Alger précède d’un demi siècle le protectorat de Tunis et de 82 ans celui du Maroc), ni les aspirations de l’envahisseur ne coïncident. Pourtant, un point commun semble se détacher. Celui-ci est en même temps capital et risible. Capital puisqu’il est à l’origine des velléités de domination des Français et risible par sa démesure avec la suite des évènements. Si l’on en croit les historiens, la cause apparente de la colonisation française est, quoique absurde, réellement anecdotique. Elle se résume à une sombre histoire d’argent et d’amour propre. En effet, la trame de la présence des français sur un territoire qui ne leur appartient pas se noue sur un fond d’emprunt. Cependant, vu la tournure prise par les évènements, nous pourrions nous tromper de créditeur. Au départ, la supériorité presque naturelle de ce dernier ne se trouve pas du côté auquel on peut s’attendre :

« L’intervention française fut la suite inattendue d’une affaire commerciale et financière à laquelle se trouvait mêlé le dey Hussein. Celui-ci, mécontent du retard apporté par la France au remboursement de créances auxquelles il était intéressé, s’en prit au consul français qu’il frappa. Le gouvernement de Charles X, n’ayant pas obtenu d’excuses, riposta par le blocus d’Alger qui devait durer trois ans. A la suite de la canonnade d’un vaisseau parlementaire, une expédition militaire contre Alger fut décidée »[7].

L’ironie du sort est ici remarquable. L’Algérie, devant de l’argent à la France par l’intermédiaire de son dirigeant Turc, se voit privée de son autonomie pendant plus d’un siècle et souffre les inconvénients de l’intrusion d’une civilisation hostile à cause d’un camouflet. Le crime de lèse majesté opérant de part et d’autre de la Méditerranée, une longue période de batailles et de révoltes s’ensuit, causant la perte du « leadership » ottoman sur la région et l’apparition de nouveaux chefs charismatiques issus du système tribal de l’arrière-pays, tel que l’émir Abd el-kader.

Entre 1830 et 1857, la France fait ainsi face aux troubles sociaux causés par le vide politique consécutif à la rébellion contre les derniers bastions de l’Empire Ottoman. Elle se décide enfin à occuper le pays après un long bras de fer, tant avec les autochtones qu’avec les Turcs. Commence alors pour l’Algérie et bientôt pour ses voisins, une véritable colonisation ponctuée de révoltes, la plupart du temps sans grand danger pour les intérêts français. La politique et l’opinion publique en métropole sont en cette seconde moitié du XIXe siècle, favorables à l’implantation de colons dans le territoire nouvellement conquis. Des vagues successives de masses coloniales commencent alors à s’abattre sur les rivages du sud méditerranéen, créant la mise en place d’un système d’exploitation des terres et des richesses naturelles du pays par une minorité étrangère.

« Quelque 700 villages français furent ainsi fondés qui modifièrent complètement la physionomie des campagnes algériennes où les agglomérations rurales, sauf en Kabylie, étaient fort rares. (…) Le quart du sol cultivé appartenait, dès lors, aux colons ruraux qui représentaient environ 2% de la population agricole »[8].

 La colonisation n’est pas uniquement rurale et agricole. Elle s’étend surtout dans les villes, créant des pôles économiques et administratifs calqués sur le modèle européen. D’ailleurs, les colons se retrouvent très vite chez eux tout en restant sur place puisqu’en 1881, la France annexe et départementalise l’Algérie. C’est à cette même période que le protectorat est déclaré en Tunisie, toujours à cause d’une affaire d’argent. Cette fois, la France est créancière tout comme elle le sera en 1912 vis-à-vis du Maroc. Peut-on de ce fait avancer l’hypothèse d’une colonisation calculée et préméditée ? Celle de L’Algérie semble fortuite mais nous ne pouvons ignorer que les pays occidentaux s’adonnent depuis longtemps au jeu de la concurrence aussi bien sur le plan de l’éclat intérieur que des conquêtes extérieures.

L’Afrique du Nord, de par sa position géographique stratégique, est sans doute l’objet de toutes les ambitions. Son histoire en témoigne, puisque bien avant la France, des comptoirs commerciaux phéniciens aux maigres efforts d’urbanisation des Ottomans en passant par les installations agricoles romaines et la brèche idéologique creusée par les Arabes dans leur conquête avortée de l’Occident, plusieurs hégémonies s’y sont installées. D’ailleurs, le Maroc, unique pays à avoir résisté au seul envahisseur turc, n’est-il pas, à la veille du protectorat français, déjà convoité par le Portugal et l’Espagne ? La Tunisie n’est-elle pas un pion manipulé par l’Angleterre, la Prusse, la Russie et la France sur l’échiquier des possessions ottomanes ? Cette colonisation fragmentée met l’accent sur la volonté de la France de conforter ses positions en Algérie. Elle a d’ailleurs raison de couvrir ses arrières car le risque de mutinerie ne vient pas de la communauté musulmane algérienne dont l’élite a été mise à mal par la départementalisation et la centralisation du pouvoir dans les ministères et le Parlement français, mais de la Tunisie dont les institutions n’ont pas été totalement démantelées et qui voit, au début du XXe siècle, monter une résistance d’abord symbolique avec « l’affaire du Djellaz » (le 7 novembre 1911, Tunis connaît une émeute sans précédents), ensuite plus intellectuelle et plus organisée après avoir fait ses classes en Métropole ou en Orient :

« En 1927, plusieurs mouvements sont créés dont l’Association des étudiants musulmans nord-africains en France ; cette association, qui existe encore, allait servir de cadre et de lieu de rencontre à une très grande partie des élites maghrébines qui se sont ainsi connues, fréquentées à Paris et ont appris à militer ensemble. Certes, beaucoup d’étudiants d’alors, ministres plus tard, étaient séduits par les idées révolutionnaires à la fois françaises et marxistes. Mais cela ne saurait faire oublier l’importance et la pression des idées venues du Machrek à travers les prêcheurs de la Nahda dès le début du siècle. Ces derniers devaient sensibiliser une partie importante des maghrébins aux idées panarabes et panislamiques »[9].

Deux mouvements idéologiques contradictoires concourent donc à l’éveil de la conscience politique des maghrébins. La crise économique mondiale aidant, les années 30 voient un regain de violences et l’apparition d’une figure qui devient vite emblématique de l’insoumission du peuple tunisien : Habib Bourguiba. Les prémisses du militantisme nationaliste algérien apparaissent avant la seconde guerre mondiale avec des revendications parlementaires pour les musulmans. Au Maroc où les institutions traditionnelles ont subsisté tout comme le système beylical en Tunisie, les premiers troubles sérieux commencent aussi à la même période. Pourtant, le nationalisme maghrébin est mis entre parenthèses durant la guerre pour faire naître un sentiment anti-nazi en symbiose avec les préoccupations immédiates de l’occupant français. Certes, quelques collaborations ont eu lieu çà et là, mais dans l’ensemble, le Maghreb a combattu la présence allemande et plusieurs troupes « indigènes » ont renforcé les rangs français.

Les lendemains de la guerre se présentent comme une période de reconstruction aussi bien pour la France que pour la résistance maghrébine. La Tunisie et le Maroc réitèrent leur volonté d’indépendance auprès d’une administration française encore hostile à cette éventualité malgré sa propre expérience de l’occupation. Les Algériens modérés dont les revendications sont différentes, obtiennent gain de cause avec l’abolition de l’indigénat et l’établissement d’une soi-disant égalité civile en 1944[10]. Mais le nationalisme gagne les trois pays et le recours à la violence reprend de plus belle. Nous pouvons parler dès lors à différents degrés suivant les pays, de guerres d’indépendance. Parmi les trois pays, le Maroc est celui qui a le moins combattu pour sa liberté :

« Au lendemain du conflit (la seconde guerre mondiale), la situation avait considérablement changé. Les difficultés alimentaires, montrant la fragilité de l’économie du pays, avaient provoqué une grande misère et une forte émigration rurale. Le système colonial avait partout été ébranlé, la Charte de l’Atlantique avait rappelé le “droit de tous les peuples à choisir la forme de gouvernement sous lequel ils veulent vivre”. Le débarquement américain de novembre 1942, l’entrevue d’Anfa de 1943 où le sultan rencontra Roosevelt, les encouragements du président des Etats-Unis au nationalisme marocain précisèrent les revendications des partis politiques. L’influence de la ligue arabe, la caution donnée au mouvement nationaliste par le sultan (discours de Tanger, 1947) rendaient urgente une nouvelle définition du régime du protectorat »[11].

Les sultans marocains s’étant successivement opposés au protectorat, le dernier d’entre eux, Mohammed V, est resté le symbole de la lutte nationale pour l’indépendance malgré la politique de l’occupant qui n’a cessé de manœuvrer afin de mettre en place un sultan qui lui soit favorable. Contrairement aux régimes d’origine ottomane instaurés en Tunisie et en Algérie, la dynastie chérifienne est issue du peuple marocain et bénéficie d’un large crédit auprès de celui-ci. En outre, la dimension religieuse et sacrée du royaume alaouite lui épargne les inconvénients de la rivalité politique avec un parti indépendantiste important tel que l’Istiklal. Les différences entre les trois pays ne s’arrêtent pas là. Le Maroc garde après son indépendance une certaine continuité avec un même type de régime, à savoir la royauté, tandis que l’Algérie et la Tunisie passent au régime républicain. Là également, la nature du passage d’un régime à l’autre diffère. La France, en annexant l’Algérie, écarte le dey et toutes les institutions rattachées à son gouvernement. La Tunisie par contre, ne proclame la République qu’après son indépendance, en 1957. De surcroît, la lutte pour l’indépendance a surtout eu lieu sur le plan diplomatique pour le Maroc et la Tunisie, même si les émeutes et les actes de violence contre les Français n’ont pas fait défaut durant la décennie qui suit la seconde guerre mondiale. Par contre, il a fallu une guerre meurtrière de sept ans pour que l’Algérie, forte de l’appui de ses voisins, sorte du joug de la Métropole et échappe aux velléités indépendantistes de certains colons.

            Pour ces jeunes nations, l’indépendance ouvre la voie à d’autres inquiétudes. Après la ferveur consécutive à la libération, des luttes intestines pour la prise de pouvoir s’installent assez vite et scellent le destin politique du Maghreb. Les figures de proue des mouvements de libération (Hassan II en tant que descendant de Mohamed V au Maroc, les personnalités du F.L.N/A.L.N en Algérie et Bourguiba en Tunisie) mettent en place rapidement les assises de régimes autoritaires sous couvert d’idéologies humanistes, religieuses ou socialistes. Malgré toutes leurs précautions, les trois pays ont connu la menace des coups d’Etats militaires et des révoltes civiles qui se suivent dans une atmosphère d’insécurité. Purges, assassinats commandités et relâches pseudo-démocratiques ne suffisent pas à assainir une vie politique commencée sous le signe de la monocratie. Le pluripartisme existe certes avec des fortunes différentes selon le pays, mais il ne peut s’interposer face à la nouvelle hégémonie des individus exerçant le pouvoir et des partis « officiels ». Bourguiba et Hassan II créent ainsi des partis, des parlements et des constitutions à leurs mesures (ou devrait-on dire à l’image de leur démesure) qui relèguent l’opposition au rôle de simple faire valoir. La branche armée du F.L.N impose les candidats à la présidence de l’Algérie et, malgré le nombre très élevé de partis existants par rapport aux Etats voisins, ressemble plutôt à un parti unique. La corruption gagne vite les sphères les plus élevées du pouvoir. Ce phénomène, conjugué à une répression incessante, crée une insatisfaction sociale, un sentiment irrépressible d’injustice et, peu à peu une lassitude, voire un désintérêt de la politique et la perte de la notion de citoyenneté héritée du système colonial. Les politiques post-coloniales des trois pays du Maghreb sont donc caractérisée par l’incertitude quant à l’avenir à cause du manque de démocratisation de leurs institutions. En Algérie, la montée du fondamentalisme musulman apparaît pour les masses comme l’unique alternative au F.L.N. Les troubles commencés en octobre 1988 sont d’ailleurs la résultante directe du « ras-le-bol » populaire. En Tunisie et au Maroc, l’éviction de Bourguiba et la mort de Hassan II laissent entrevoir, notamment au niveau des libertés publiques, une lueur d’espoir que seul l’avenir confirmera ou infirmera. L’épisode colonial a donc profondément et définitivement modifié le paysage politique maghrébin. Sur le plan théorique, une monarchie parlementaire et deux républiques remplacent désormais l’ancien régime. Et, fait marquant, pour la première fois de son histoire, le Maghreb, après s’être débarrassé par ses propres moyens de deux présences coloniales, est totalement gouverné  par ses propres ressortissants. 

Du changement radical du paysage socioculturel :

            Longtemps, la « blessure » de la colonisation française a été le porte drapeau du nationalisme maghrébin. Pourtant, les discours populistes ne reflètent pas la réalité des politiques menées par les trois nations du Maghreb anciennement colonisées par la France. La dénonciation, les revendications de toutes sortes et parfois même le désir de vindicte, loin de favoriser l’appropriation de nouveau des racines oubliées, ont engendré des société hybrides, prises entre deux feux tout aussi fascinants l’un que l’autre. En d’autres termes, depuis et avant même le départ des français, le cœur des maghrébins n’a cessé de balancer entre l’Orient et l’Occident.

            La colonisation française bouleverse considérablement le paysage socioculturel maghrébin. En favorisant l’installation des colons en Algérie par la création d’une infrastructure adéquate (expropriations, construction de villages ruraux, de routes et de chemins de fer, agrandissement des villes, encouragements à l’expatriation, etc.), la France exporte aussi une langue, un mode de vie, des habitudes vestimentaires et culturelles ainsi que des mœurs totalement étrangers aux habitants du pays :

« La colonisation française reposa essentiellement, en Algérie, sur le principe de la “colonisation officielle”. L’administration des Domaines se procurait des terres par divers procédés d’expropriation, dont le “cantonnement”, qui s’apparenta au refoulement des tribus, et l’affirmation des droits prétendus de l’Etat français sur les habous publics, les terres incultes ou sans maître, les forêts, etc. L’Administration créait ensuite et aménageait des centres villageois. Elle concédait gratuitement des lots individuels aux immigrants de nationalité française, sous condition suspensive de résidence obligatoire »[12].

Avec le débarquement des Européens (les Français ne sont effectivement pas les seuls « immigrés »), la deuxième moitié du XIXe siècle voit deux peuples cohabiter selon le modèle de la domination d’une minorité privilégiée sur une majorité écartée de la gestion de son propre territoire, mais insoumise. Cette minorité s’organise donc en autant de micro-sociétés et va jusqu’à désirer son autonomie par rapport à la Métropole avant que n’apparaisse le nationalisme arabo-musulman. Sous couvert de simple protectorat, l’administration française impose quelques années plus tard, la même politique coloniale aux deux autres pays du Maghreb. L’exemple du Maroc est à ce titre significatif puisque plusieurs ports ont été construits à des fins commerciales, modifiant ainsi le paysage urbain du pays :

« (…) En décidant de bâtir à Casablanca le port moderne du Maroc, d’établir à Rabat le centre politique et administratif de l’Etat marocain, de créer ex nihilo à Kenitra un pôle régional capable d’établir une emprise spatiale sur les plaines du Sebou, les autorités du protectorat ont transformé l’organisation et le fonctionnement de l’espace marocain. L’insertion du Maroc au sein du marché mondial s’est traduite par l’accumulation sur le littoral des hommes, des moyens de production (…) et des pouvoirs d’organisation au détriment des zones intérieures. (…) Enfin, le taux d’urbanisation, de 8% au début du siècle et de 25% en 1960, est passé à plus de 45% »[13].

Le nombre de villes et la sédentarisation croissent certes sensiblement avec les Français, mais l’opposition littoral/intérieur existe partout dans le Maghreb bien avant leur arrivée. Sur ce plan, la géographie vient au secours du social pour justifier la répartition déséquilibrée des populations. La colonisation n’a donc fait qu’amplifier grâce à des structures modernes et des choix stratégiques différents, un phénomène déjà ancré dans les usages locaux. En outre, la géographie humaine de la Tunisie et de l’Algérie ajoute une autre opposition : Nord et Sud. Le Nord, généralement plus sédentarisé et doté d’un climat plus clément pour l’homme, regroupe la majeure partie de la population. Ainsi en est-il en Tunisie depuis l’époque carthaginoise qui « a assis sa domination le long du littoral » :

« Pour les citadins et les villageois, hommes de terroir et de savoir, dont la production et les échanges étaient régis par l’appropriation privative et la circulation monétaire, les bédouins faisaient figure de prédateurs, d’hommes frustes et belliqueux, enclins à piller et à rançonner. Bédouin et razzia ne faisaient qu’un dans l’imaginaire citadin. Inversement, le raffinement des mœurs associé à la citadinité allait à l’encontre du code de l’honneur bédouin, qui l’assimilait à de la faiblesse. Séparées par une profonde méfiance réciproque, les deux sociétés n’en partageaient pas moins la même religion et la même langue »[14].

Les colonisations successives du Maghreb exacerbent le phénomène jusqu’à le transformer en régionalisme. Ce dernier connaît après l’indépendance, sa forme la plus marquée, au moment où en Algérie et en Tunisie, les expériences collectivistes d’inspiration communistes dépossèdent les paysans de leurs terres et favorisent l’explosion de l’exode rural. Dès lors, les villes surpeuplées, s’adaptent difficilement aux invasions des « réfugiés économiques », permettant ainsi l’éclosion des bidonvilles en bordure des quartiers résidentiels les plus modernes et accueillant une forte catégorie de chômeurs à la fleur de l’âge. De plus, l’édification par les Etats soucieux de leurs développements économiques, de complexes industriels isolés ou dans les banlieues des grandes villes,  engendrent l’apparition de villes au seul usage de la masse prolétaire. De ce fait, les mutations urbaines entamées depuis la colonisation sont à l’origine des distorsions sociales qui s’amplifient au cours des années soixante-dix, provoquant un retour progressif au capitalisme en Tunisie et une réforme timide par le président Bendjedid en Algérie. Le Maroc n’est pas en reste en ce qui concerne le chômage et l’apparition de deux classes sociales fortement opposées : une minorité de riches se partagent aujourd’hui même la totalité des richesses et des activités économiques du pays, alors qu’une majorité vit dans la misère. Or, ce pays qui a connu, contrairement aux autres, un fonctionnement féodal jusqu’à la colonisation, a tous les moyens de moderniser ses structures. Les décennies qui suivent l’indépendance représentent, sur ce plan, une continuité avec les structures ottomanes et celles qui les précèdent dans la mesure où elles appliquent des politiques qui favorisent le littoral au détriment de l’intérieur.

La colonisation française présente pourtant un avantage pour l’espace rural dans la mesure où elle relance et développe l’agriculture. Dans les villes, les constructions à l’européenne, en dehors des Médinas traditionnelles, transforment l’architecture. Des bâtiments nouveaux apparaissent : des théâtres à l’italienne, des brasseries et des terrasses de cafés, des immeubles, et même des salles de projections après la naissance du cinéma. Des petites exploitations fermières aux principales villes en passant par les agglomérations rurales, l’aspect extérieur du Maghreb change et ressemble de plus en plus à l’Europe. Au delà de son aspect esthétique, le style colonial apparaît pour servir les intérêt des colons. Les sociétés « indigènes », restées en marge aussi bien dans les milieux urbains que dans les campagnes, gardent leurs habitudes. Pourtant, une partie d’entre-elles devient francophile et adopte les usages et les manières des colons. La plupart du temps, il s’agit de l’élite aristocratique ou intellectuelle séduite par l’Occident et par les symboles qu’il représente.                                           

Ayant introduit les idéaux et les fondement de la société « moderne », les Européens partent en laissant derrière eux le désarroi des autochtones face au travail monumental qui les attend pour terminer une œuvre à peine ébauchée. Désormais, il n’est plus question de retours hasardeux vers des institutions et un fonctionnement sociaux sclérosés. Le mandarinat turc et le système tribal nomade ainsi que le féodalisme marocain sont autant de freins au progrès qui a fait ses preuves de l’autre côté de la Grande Bleue. C’est donc tout naturellement que les préoccupations des gouvernements se tournent d’emblée vers le développement des politiques sociales et industrielles. Les syndicats, la sécurité sociale, les politiques nationale de planning familial et éducatives luttant plus ou moins assidûment contre l’analphabétisme et des démographies galopantes, les différents statuts du code personnel, la libération et l’instruction des femmes, connaissent des sorts différents selon le pays. Le roi du Maroc revendiquant le statut sacré de son pouvoir et le gouvernement algérien de Ben Bella ne se sont pas attaqués à ce qu’ils considèrent comme des piliers de l’Islam et qui est en fait le propre d’une société patriarcale figée :

« L’Etat-parti (tunisien) a (…) promulgué un Code du statut personnel (août 1956) tendant à déstabiliser la famille patriarcale et à lui substituer la famille conjugale »[15].

Ainsi le féminisme tunisien trouve-t-il un digne chef de file en la personne de Habib Bourguiba, résolument occidentaliste. Il réussit très tôt et ce malgré les critiques acerbes des traditionalistes à  débarrasser les femmes de leurs voiles, à les instruire (le taux d’analphabétisme féminin reste toutefois très élevé en milieu rural), à abolir la polygamie, à instaurer l’égalité des salaires et des droits civiques et à réduire la démographie à des taux parfois inférieurs à certains pays occidentaux. Il ne continue cependant pas son œuvre de modernisation et ne modifie ni l’enseignement public qui n’est toujours pas laïc, ni les modalités de l’héritage, ni l’accession des femmes au pouvoir suprême, ni même leur droit de tutelle (ce dernier est modifié par le second président tunisien, Zine el Abidine Ben Ali). Ces domaines restent donc le fort de la Tunisie qui continue à être une exception à bien des égards au sein des nations arabes. Si l’Algérie et le Maroc n’ont pas autant adopté les principes sociaux occidentaux, il n’en reste pas moins que leurs sociétés respectives se développent selon une vitesse et des critères qui leur sont propres. Cela étant, ces pays connaissent d’une manière plus accusée peut-être qu’en Tunisie, les affres d’une démographie trop élevée et ses conséquences directes (chômage, problèmes de logements, etc.).

            A l’image des déficiences et des acquis sociaux, la culture connaît au Maghreb des sorts divers. Cependant, deux traits essentiels semblent la caractériser dans l’ensemble des pays : l’héritage colonial français et ses antagonismes avec les autres héritages et en premier lieu avec celui des Arabes. Le « mélange des genres » paraît une constante dans le paysage culturel. En outre, si la France a permis l’accès du Maghreb à la culture occidentale, cette dernière est, depuis l’indépendance en progression continue, grâce au phénomène de mondialisation des médias et de la communication. Le progrès technologique prend le relais de la prise de possession territoriale en imposant une vision du monde et un mode de vie uniformisés. Les français ont certes fait connaître le théâtre (genre qui n’existait pas dans les pays du Maghreb, sinon sous sa forme rudimentaire de spectacle de rue ou sous les traits du conteur public traditionnel) le cinéma, la presse et leur littérature, mais ils n’ont pas encouragé sinon permis les productions par les autochtones. Lorsqu’ils prennent le pouvoir, les gouvernements maghrébins n’accordent pas non plus de crédit à ce volet de la vie sociale. Constamment voilée par des discours de propagande idéologique (la révolution culturelle en Algérie) ou religieuse (l’Islam et la langue arabe étant les fondements mêmes de la culture maghrébine), la culture est reléguée au dernier plan des soucis étatiques.

Malgré les revendications régionales qui ne concernent essentiellement que la culture berbère, le domaine culturel reste désespérément béant. Les productions théâtrales, souvent d’inspiration étrangère, sont sporadiques. Bien que le cinéma bénéficie d’une infrastructure importante par rapport aux autres secteurs parce qu’il représente une source de revenus substantielles grâce aux tournages internationaux, il ne présente toujours pas assez de films. En outre, la censure aidant, plusieurs intellectuels et hommes de culture s’exilent dans des pays où leur créativité trouve un répondant. Seul le domaine musical échappe à la règle puisqu’il ne constitue pas un danger pour les systèmes politiques en place. Ici, la production prolifère même si elle est inégale et en butte à la concurrence égyptienne. Partout dans le Maghreb se détachent deux types de cultures musicales, une branche populaire et folklorique et une autre savante et classique. La première, issue des différents terroirs est largement diffusée auprès du public et ce par l’intermédiaire de concerts publics ou privé, de réseaux de diffusions d’enregistrements. La seconde, plus sophistiquée grâce à ses origines andalouses et turques, n’est accessible qu’à une partie des populations citadines et ce malgré les efforts entrepris depuis le 1er congrès de musique arabe, tenu au Caire en 1932, pour promouvoir le patrimoine musical et produire, comme les orientaux, un chant représentatif des identités culturelles des trois pays du Maghreb.

Les influences étrangères sur la culture du Maghreb sont telles qu’il est toujours difficile de parler de culture maghrébine à proprement parler. Ses influences se prolongent avec la télédiffusion par satellite et ne sont pas prêtes de cesser. Aujourd’hui, la France concurrencée par l’Egypte dans tout le Maghreb, par l’Italie en Tunisie et par l’Espagne au Maroc, voit son ascendant culturel s’effacer progressivement au profit de l’hégémonie anglo-saxonne. Toutefois, malgré le panarabisme, le profond ancrage de la culture arabo-musulmane au Maghreb et les différents efforts d’arabisation de l’éducation et des administrations, la francophonie demeure le symbole d’une politique d’ouverture. Le français garde encore son statut de langue de transmission du savoir (notamment dans les secteurs scientifiques) et de communication avec l’extérieur. A titre d’exemple, la Tunisie a opté pour une expérience anglophone dans certains établissements scolaires, sans succès. En effet, le manque de débouchés concrets faisant défaut à cause de réalités géographiques et politiques évidentes, l’abandon de la tentative d’ouverture sur le pôle anglo-saxon s’est imposé de lui-même. Ce qui est déplorable par contre, c’est que la France, prétextant le recours à une politique égalitariste dénuée de tout paternalisme, ne se soucie plus de la francophonie et laisse ainsi le champ ouvert à toutes les éventualités.   

Littérature, bilinguisme et acculturation :

« (…) Plusieurs langues et plusieurs littératures se succèdent et s’entre pénètrent dans ce cadre naturel traversé par les hasards et les violences d’invasions et de conquêtes qu’il a d’abord toujours subies, puis dont il a su régulièrement tirer parti, les tournant à son avantage et les amenant à sa mesure. Ainsi, sans cesser d’être jamais lui-même – ce qui le faisait appeler “berbère” par ceux qui montrait par là leur échec à le réduire –, le Maghreb a été punique et juif, grec et latin, vandale et byzantin, arabe, turc et français, avant de donner naissance à de jeunes nations que l’affirmation de leur nouvelle indépendance politique conduit immanquablement à faire un inventaire critique de toutes leurs traditions culturelles »[16].

La culture berbère, quoique persistante, n’a donc pas été hermétique à l’invasion territoriale. Depuis les conquêtes islamiques, la langue arabe a dominé les dialectes locaux et la succession des différentes dynasties arabo-musulmanes a consolidé l’aliénation. La langue arabe, définitivement sanctifiée et assimilée à la parole divine, gagne par là même sa dimension sacrée. De ce fait, l’Empire ottoman n’a pas osé imposé le turc, au contraire, les dignitaires mandatés dans la région, aussi bien à Alger qu’à Tunis, n’ont introduit que certains aspects de leur culture (cuisine, musique, traditions), d’autant plus qu’ils représentaient, théoriquement et symboliquement, la continuité du pouvoir arabo-musulman, lui-même chapeauté par le pouvoir divin exprimé dans le Coran, en arabe. Avec la colonisation française, les donnes changent : il s’agit d’une autre civilisation, mais surtout d’une autre religion et d’un autre regard.

            Sous l’influence de l’occupation française, précisément aux lendemains de son centenaire, ou encore aux « alentours de 1930 – année de la célébration du centenaire de la colonisation » est née « en Algérie, (…) avant de se développer dans les deux pays voisins »[17], une forme d’expression littéraire que l’on désigne aujourd’hui par des appellations telles que littérature maghrébine de langue française, littérature maghrébine d’expression française, littérature francophone du Maghreb. Elle est donc apparue sur le tard, en fin de période coloniale. Les premiers auteurs algériens écrivant en langue française pour être admis au départ dans le cercle de la littérature coloniale, entament une « timide contestation »[18] et se laissent décrire comme « un “échantillon” de la réussite de la mission salvatrice de la France, exhibés pour justifier la politique d’assimilation »[19].

            Après la seconde guerre mondiale, les contradictions nées des interférences entre démagogie coloniale et valeurs démocratiques et humanistes ressenties de part et d’autre de la Méditerranée ont permis l’éclosion d’un nouveau mouvement littéraire, cette fois bien ancré dans la contestation et la dénonciation. Mimésis se transforme alors en catharsis, au moment où se prépare l’affrontement final. Il est cependant communément admis que la littérature maghrébine d’expression française est apparue à cette dernière époque, c’est-à-dire après la seconde guerre, ce qui relègue les figures des débuts littéraires, peut-être après tout pas très glorieux, dans le brouillard des laissés-pour-compte. C’est en somme vers 1950, avec les premiers romans de Mouloud Feraoun, notamment « Le Fils du pauvre »[20], Mohammed Dib et Albert Memmi que les critiques s’accordent à situer la véritable naissance de cette littérature. En utilisant la langue de l’« autre » pour se démarquer de lui, s’est effectuée une « prise de conscience fondatrice de la littérature maghrébine d’expression française depuis les conquêtes islamiques » dont le catalyseur n’est autre que le « sentiment douloureux d’une identité méconnue, occultée ou bafouée »[21]. L’apparition soudaine de cette littérature à un moment précis de l’histoire (il faut bien l’avouer) algérienne, a eu lieu « d’une part, parce qu’il y avait au Maghreb une quantité suffisante de gens bien formés à la langue française et, d’autre part, parce que la culture littéraire, loin d’y être un fait nouveau, perdurait sous diverses formes, en langue arabe ou berbère, écrite ou parlée »[22]. Si monstre il y a, il a bien été créé par les autorités coloniales qui, dans une perspective d’assimilation, procèdent « dès les années 1880, (au) démantèlement des institutions locales (qui) bouleverse la société algérienne. L’imposition du français comme langue de l’administration, de la justice, de l’enseignement détermine un nouveau statut pour les Lettres dans une nouvelle hiérarchie linguistique. En effet, l’enseignement de l’arabe, plus ou moins confiné au rituel religieux, ne se maintient que de façon rudimentaire »[23]. Il faudra donc, malgré les réticences idéologiques, faire fi de toutes les susceptibilités et apprendre la langue du colon pour pouvoir s’affirmer dans le système en place. Il s’agit en l’occurrence d’apprendre la langue de cet « autre » hautain et méprisant, afin de lui montrer qu’il a tort d’occulter les capacités intellectuelles d’une communauté qu’il voulait cantonner dans des activités manuelles ou prolétariennes, en modifiant sa stratégie éducative coloniale, passant ainsi de l’outil d’assimilation au modèle de ségrégation, n’accordant aux autochtones que « les rudiments d’une culture dont tout le monde a désormais compris qu’elle peut être le moyen d’une émancipation, voire d’une conquête de l’égalité des droits avec les colons »[24]. Ou alors, il faudra continuer à écrire dans sa propre langue, populaire ou classique, arabe ou berbère, prendre en quelque sorte le maquis, opposer une « résistance à la déculturation »[25]. Certains auteurs reçoivent ainsi une instruction bilingue (par exemple, Rachid Boudjedra, Abdelkébir Khatibi et Abdelwahab Meddeb)  alors que d’autres n’ont pas cette opportunité. Le bilinguisme et la crise identitaire causée par l’intrusion du colon français ont fait l’objet de plusieurs études durant les trois décennies qui suivent l’indépendance de l’Algérie (dernier pays du Maghreb à être décolonisé) à tel point qu’il s’agit maintenant de deux clichés de la littérature maghrébine.

            L’Algérie est aujourd’hui, quarante ans après sa décolonisation, toujours considérée comme le chef de file de la littérature maghrébine d’expression française, le lieu de sa naissance et de son développement. L’hypothèse la plus répandue concernant cette position de prédilection, la décrivant tantôt sous les traits d’Orphée charmant les dieux, tantôt sous ceux de Prométhée leur volant le feu pour le donner aux humains, est sans doute l’apparition plus tardive des littératures marocaine et tunisienne de langue française, « autour des années cinquante »[26]. Il est communément admis qu’un fait historique marquant semble à l’origine de l’essor littéraire :

« La Tunisie et le Maroc n’ont point connu la violence coloniale qui a sévi en Algérie, ni la radicalisation des processus identitaires ; ils ont ainsi pu sauvegarder plus simplement leur culture d’origine berbère et arabe »[27].

La littérature algérienne, véritable porte-drapeau d’un courant revendicatif d’une identité et d’une culture perdues, voit ses futurs compagnons de route se débarrasser de leur timidité et la rejoindre dans un élan de solidarité et un sentiment retrouvé d’appartenance à une même communauté. Après le retrait définitif des Français du Maghreb, les pôles d’attraction de la littérature se modifient dans un processus tout à fait logique : l’ennemi n’est plus étranger, envahisseur hostile et destructeur de l’identité nationale ; il est à l’intérieur même de la société, sorte de gangrène qu’il faut combattre dans l’urgence :

« Les indépendances susciteront d’autres questions (…). Ainsi la guerre d’Algérie laisse place aux guerres d’Algérie : la critique sociale, la relation au pouvoir, l’exil, la famille, la sexualité, l’insatisfaction culturelle, le conflit entre culture savante et culture populaire, la question de l’origine et de l’identité, la question du sacré, le dialogue Orient-Occident et l’inscription dans la culture universelle »[28].

Toutefois, l’indépendance du Maghreb n’a pas suffi à la cicatrisation de la blessure. Une fois les topos du bilinguisme et de la crise identitaire dépassés, les écrivains de la fin des années soixante et des années soixante-dix (Rachid Boudjedra, Mohammed Khair-Eddine, Abdelkébir Khatibi, Tahar Ben Jalloun, Nabile Farès) s’attaquent aux maux de leurs sociétés, cette fois de l’intérieur : religion, tradition, condition féminine, patriarcat, inceste et autres tabous sexuels, bref, les blessures du corps dans tous ses états. Le mal ne vient plus de l’autre (le colon), mais de soi. Cependant, leur démarche reste en marge de leurs sociétés, créant une contradiction entre leur désir de changement profond par la remise en question et leurs exigences littéraires qui les séparent des masses. L’absence de coordination qui fonde les relations entre écrivains et lecteurs maghrébins peut se résumer dans ces propos :

« La situation des écrivains de cette génération se trouve en quelque sorte en porte-à-faux. Leur style, la forme romanesque qu’ils utilisent, les thèmes qu’ils traitent sont souvent contestataires et, à la limite, révolutionnaires. Il existe un certain décalage entre leur intention d’atteindre, de toucher, de transformer le peuple, et une production qui reste souvent hermétique, rebutant parfois le lecteur moyen. Ces auteurs écrivent pour la classe la plus éduquée et la plus bourgeoise. Leurs interviews révèlent la situation paradoxale où ils se trouvent, qui est de vouloir réformer toute la société et de ne pouvoir toucher qu’une infime partie de celle-ci »[29].

Une fois la France partie, certains de ces écrivains et d’autres qui ont, comme l’on mettrait en scène une tragédie grecque, rêvé et mis en mots des sociétés nouvelles, fondées sur des valeurs différentes dans une perspective de modernité, ont également choisi l’alternative de l’exil et ont rejoint la nation combattue par leurs aînés. Ce mouvement migratoire n’a cependant inspiré aucune concession à Mohammed Dib, Driss Chraïbi, Mohammed Khair-Eddine, Nabile Farès et Rachid Boudjedra :    

« Aucune allégeance n’est faite à la langue de l’ancien colonisateur, aucune admiration n’est formulée autrement qu’en terme de séduction perverse. Seul s’exprime un rapport tendu et passionné dans lequel les poètes maghrébins “voleurs de feu”, pour reprendre l’expression d’Arthur Rimbaud, amorcent une critique tous azimuts des systèmes de valeurs et de pensée que leur ont légués les conquêtes, qu’elles fussent d’Orient ou d’Occident, arabo-islamique ou occidentale. Cette littérature, tout en se nourrissant de l’entre-deux culturel, élabore une nouvelle problématique identitaire et revendique une double généalogie »[30].

Certains n’hésitent pas aujourd’hui à annoncer de temps à autres la mort prochaine de cette littérature avec celle de ces derniers pontes. Il serait certes plus commode d’enterrer cette écriture//lecture qui nous rappelle trop la blessure honteuse de la colonisation. En effet, on « n’admet pas toujours qu’une littérature engendrée par les anomalies de l’Histoire soit seule capable de les interpréter, de les dépasser ou de les transformer en ferments de passion et de vie »[31]. Nous mesurons ainsi l’importance de la justification de la « blessure » qui coupe les écrivains de leur passé, à travers leur volonté de soigner cette blessure par l’écriture. Par ailleurs, d’autres horizons s’ouvrent aujourd’hui à la littérature maghrébine grâce à des écrivains nés en France. La littérature « beur » ou de l’immigration, par l’intermédiaire de jeunes auteurs comme Nina Bouraoui, Azouz Begag, etc. donne un nouveau souffle à la littérature maghrébine en déplaçant dans l’espace la prise de parole et en offrant, peut-être, une alternative à l’égocentrisme de leurs aînés.

Ce petit aperçu des aspects qui caractérisent le Maghreb n’est certes pas complet. L’ampleur du sujet est telle que nous avons opté pour le développement d’une ligne directrice, mettant l’accent sur les changements décisifs opérés dans le secteur. Commencée sous le signe des mutations, l’histoire de l’Afrique du Nord continue donc son évolution sous le même signe. Le présent récupère et assimile le passé, faisant deviner une volonté farouche de ne pas rester à la traîne dans un monde en constante ébullition. Réalisant enfin le désir d’unification sous-jacent depuis les premières dynasties Arabes jusqu’à celle des Almohades, originaires de la région, aujourd’hui, le Maghreb s’étend. Doit-on dès lors persister à parler du Maghreb des trois ou commencer à envisager un Maghreb des cinq ? Et pourquoi pas, un Maghreb des six ? Depuis 1989, deux autres pays s’associent à la Tunisie, l’Algérie et le Maroc pour créer l’Union du Maghreb Arabe : la Libye et la Mauritanie. Et, depuis quelques temps, l’Egypte s’intéresse aussi au projet de l’U.M.A. Un Maghreb fort de cent-cinquante millions d’individus pourrait, dans un avenir proche, représenter une véritable puissance dans la région, contrant ainsi les blocs occidentaux et extrême orientaux sur le plan économique et pouvant disputer une place auprès des marchés mondiaux. L’Afrique du Nord s’agrandit de ce fait sur le plan économique et politique pour faire face à la mondialisation. Cet espace brise les frontières de la colonisation française en inventant un nouvel ordre, une nouvelle identité. Le Maghreb s’approprie enfin son devenir et s’affranchit d’une tutelle devenue obsolète. Grâce à cette union, il panse ses blessures afin d’envisager sereinement l’avenir. Mais bien des difficultés obstruent son entreprise et il lui faut beaucoup de courage et de souffle pour continuer sa marche et se créer un espace auprès des géants qui mènent actuellement la danse du monde.

 


Bibliographie

Nous présentons ici les ouvrages d’ordre général qui ont servi d’assise à ce travail. Le nombre d’études (livres, articles et thèses confondus) consacrées au Maghreb étant gigantesque, nous renvoyons pour de plus amples informations, à la banque de données Limag, désormais institutionnalisée et disponible sur l’Internet.

 

-         ARNAUD, Jacqueline. La Littérature maghrébine de langue française, 1/ Origines et perspectives, Paris, Publisud, 1986.

-         BEAUMARCHAIS, Jean-Pierre (de). COUTY, Daniel. REY, Alain. Dictionnaire des littératures de langue française, ouvrage publié avec le concours du Centre National des Lettres, Paris, Bordas, 1984, 3 volumes, 2637 pages.

-         BERQUE, Jacques. Le Maghreb entre deux guerres, Paris, Seuil, 1962 ; réédité, Tunis, Cérès, collection Africana, 2001, 2 volumes, 680 pages.

-         BONN, Charles et KHADDA, Naget (sous la direction de). Littérature Maghrébine d’expression française, Vanves, EDICEF/AUPELF, 1996, 271 pages.

-         DEJEUX, Jean. La littérature maghrébine d’expression française, Paris, Presses universitaires de France, collection Que sais-je ? 1992, 127 pages.

-         FREMY, Dominique et Michèle. Quid 1993, Paris, Robert Laffont, 1992, 2028 pages.

-         JULIEN, Charles-André. L’Afrique du Nord en marche – Nationalismes musulmans et souveraineté française, Paris, Julliard, 1972 ; réédité, Tunis, Cérès, collection Africana, 2001, 2 volumes, 729 pages.

-         LAROUI, Abdallah. L’histoire du Maghreb – Un essai de synthèse, Casablanca, Centre Culturel Arabe, 1995, 390 pages.

-         LEMARCHAND,Philippe (sous la direction de). Atlas géopolitique du Moyen-Orient et du monde arabe, Paris, Complexe, 1994, 281 pages.

-         Maghreb, Tunisie, Algérie, Maroc, Littératures maghrébines in-Encyclopædia Universalis, Paris, 1990.

-         MEMMI, Albert. Ecrivains francophones du Maghreb – Anthologie, Paris, Seghers, 1985.

-         MITTERAND, Henri (sous la direction de). Dictionnaire des œuvres du XXe siècle – Littérature française et francophone, Paris, Dictionnaires Le Robert, coll. Les Usuels, 1995, 621 pages.

-         NOIRAY, Jacques. Littératures francophones – I. Le Maghreb, Paris, Belin, 1996, 190 pages. 

-         TENKOUL, Abderrahman (coordination). Ecritures Maghrébines – Lectures croisées, Casablanca, Afrique Orient, 1991, 149 pages.

-         TROIN, Jean-François (textes rassemblés par). Maghreb Moyen-Orient mutations, Paris, SEDES, 1995, coll. Dossiers des images économiques du monde, sous la dir. de André Gamblin, 348 pages. 



[1] LAROUI, Abdallah. L’histoire du Maghreb – Un essai de synthèse, Casablanca, Centre Culturel Arabe, 1995, 390 pages, p. 274.

[2] Sources : FREMY, Dominique et Michèle.Quid 1993, Paris, Robert Laffont, 1992, 2028 pages (pour les superficies).

TROIN, Jean-François (textes rassemblés par). Maghreb Moyen-Orient mutations, Paris, SEDES, 1995, coll. Dossiers des images économiques du monde, sous la dir. de André Gamblin, 348 pages  (pour les populations). 

[3] Maghreb in- Encyclopædia Universalis, Corpus, Paris, 1990, vol. 14, p. 243.

[4] Id.

[5] Maroc in- Encyclopædia Universalis, op. Cit., vol. 14, p. 591.

[6] Ibid., p. 587.

[7] Algérie in- Encyclopædia Universalis, op. Cit., volume 1, p. 767.

[8] Ibid., p. 768.

[9] Maghreb in- Encyclopædia Universalis, op. Cit., vol. 14, p. 243.

[10] Algérie in- Encyclopædia Universalis, op. Cit., vol. 1, p. 770.

[11] Maroc in- Encyclopædia Universalis, op. Cit., vol. 14, p. 586.

[12] Algérie in- Encyclopædia Universalis, op. Cit., vol. 1, p. 768.

[13] Maroc in- Encyclopædia Universalis, op. Cit., vol. 14, p. 590.

 

[14] Tunisie in- Encyclopædia Universalis, op. Cit., vol. 23, p. 51.

[15] Tunisie in- Encyclopædia Universalis, op. Cit., vol. 23, p. 57.

[16] Littératures maghrébines in- Encyclopædia Universalis, op. cit., vol. 14, p. 249.

[17] BONN, Charles et KHADDA, Naget. Introduction à Littérature maghrébine d’expression française, sous la dir. De Charles Bonn, Naget Khadda et Abdallah Mdarhri-Alaoui, Vanves, EDICEF/AUPELF, 1996, 271 pages, p. 5.

[18] Ibid. p. 7

[19] Id.

[20] Ibid. p. 6.

[21] Dictionnaire des littératures de langue française, ouvrage publié avec le concours du Centre National des Lettres, Paris, Bordas, 1984, 3 Volumes, 2637 pages, p. 1349.

[22] Ibid. p. 1350.

[23] BONN, Charles et KHADDA, Naget. Introduction à Littérature maghrébine d’expression française, op.cit. p. 6.

[24] Dictionnaire des littératures de langue française, op. cit., p. 1349.

[25] BONN, Charles et KHADDA, Naget. Introduction à Littérature maghrébine d’expression française, op.cit. p. 6.

[26] Dictionnaire des œuvres du XXe siècle, Littérature française et francophone, sous la dir. de Henri Mitterand, Paris, Dictionnaires Le Robert, 1995, coll. Les Usuels, 621 pages, p. 278.

[27] Id.

[28] Ibid., p. 279.

[29] Dictionnaire des littératures de langue française, op. cit., p. 1353.

[30] Dictionnaire des œuvres du XXe siècle, op. cit., p. 280.

[31] Id.