feu de racines  - 1 ---------------------------------------

Sans la vision d’avenir des voyants, des poètes,
des artistes, l’espèce homme ne deviendra jamais l’humanité.
 
 
silence
ombre et lumière en fête au plus secret de l’être
le jour luisant de givre
brûle en la pierre noire où nous nous sommes pris
la fleur qui nous attache au monde
où nous perdons nos yeux
 
ombre et lumière en fête au plus secret de l’être
le jour luisant de grâce
blesse l’extase infâme où nous cessons de vivre
ronge les corps
apprend de nous le chant de la tendresse en armes
son cri de fable intense
sa force claire
son jour arable
terre au cœur du verger fruit de neige multiple
antre aride où je veille
 
je nomme
un ciel absent
un temps sans crépuscule
un fruit de sang rebelle
un vivre intense
un ciel de chrysanthèmes
en joie
 
que la fleur nous répète à l’aube où naît l’espoir
que le temps malgré nous se transforme en légende
harpe et jet d’eau vivace
pierre noire où je meurs et renais au pain blanc
 
silence
un arbre clair enseigne
que les oiseaux en fuite au premier cri de l’aube
se font signe d’alliance en l’antre du printemps
 
un arbre clair enseigne
tant d’audace à cerner dans la pierre qui sonde
le couloir triste et nu de mon chagrin de fonte
tant de silence aveugle en ma prison d’étoiles
tant de clarté au monde de la chair qui saigne
                                    que l’on se tait de peur
 
*
 
j’explore dans la nuit marâtre
j’explore dans la boue infecte
 
j’endure un temps malade
un temps de givre atroce
de main griffue de haine
 
j’endure ombre au chemin de sang
prison de ronce
 
*
 
je règne
neige au cri de verdure
printemps à dire à tous en l’eau noire des jours
surprise d’être dans la pierre
un cri fertile
un astre libre
 
je règne
en terre où le printemps délivre
les oiseaux de mon cœur
en terre
où la nuit bleue récolte
perle d’eau vive au soir d’émeute
où l’âme saigne
où l’arbre humain délire
 
soif d’un visage à vivre en ce printemps de fable
en ce lieu d’herbe jeune où la nuit bleue récolte
les larmes de mon corps de terre et de phosphore
que neige amère et noire
soleil en ruine
l’hiver
glace en la nuit funèbre
en cris de givre
et crée
sa propre danse
 
soif d’un visage à vivre en un printemps de fable
 
*
 
j‘explore
astre et visage en peine
neige et chemin de haine
jungle du crime et loi mortelle et nuit de ronces
 
j’explore
le chagrin de la pierre où le soleil juste un homme
prend racine en l’amour contre haine et servage
couleur contre ces cris de haine et de violence
couleur de neige à vivre au seuil dur du silence
 
j’explore
terre où la mort me prend notre plus claire image
un grand vivre de perle dans un chant de cascade
que mon âme est en droit de reprendre au fantôme
 
j’explore
l’âpre temps que la mort ouvre au soleil nocturne
comme on ouvre un visage au grand soleil menteur
comme on attend la pluie outre augure et mystère
grave l’étang où stagne la peur d’être un visage
 
j’explore
des rues jointes de peur des yeux fermés de givre
air noir silence d’encre espoir nuit sans fenêtre
ordure au cœur du temps qui nous cerne de pierre
malheur d’être un visage infirme exclu du nombre
 
j’explore
la peur d’être un miroir où sont tombés les miens
je pleure un ciel absent je pleur une aube morte
un astre en fuite égorge un spectre blanc d’écume
et laisse en nous monter la fleur de l’impossible
 
j’explore
herbe sèche et noirceur
douceur d’être un rivage
 
silence
où je découvre
ombre et lumière en fête au plus secret de l’être
un jour luisant de givre
 
des gens
            de terre à vivre
            de neige à boire
            de nuit à fendre
 
des gens
            de pluie subtile
            de grâce intègre
            au règne d’astre
 
et je découvre
des corps cernés de mort des yeux troués de peine
un temps sans récompense où nous errons sans yeux
de cage en cage
au jour de perle éteinte où nous nous sommes pris
dans la nuit des tyrans dans la sinistre algèbre
où grand soleil en ruine un homme entre en vigueur
et parle
et vous dénonce
au jour noir de vengeance
qui vous livre à sa danse
 
*
 
couleur que le jardin délivre
douceur d’être un visage
ombre infâme où je meurs
 
espoir
la fleur surgit du temps
 
espoir
porte une étoile au front
 
la nuit remonte en croix entre l’ombre et nos yeux
et vous cris de fontaine au feu de feinte ivresse
 
distance où nous cessons de luire
courage où l’herbe tendre entre au palais du crime
linceul blanc du silence et grand espoir en loques
 
un arbre saigne et vous dénonce
 
*
 
chantez contre les nains
la nuit broie mon visage
 
*
 
dans la cohue des jours pétris de vieux silence
homme au feuillage clair
arbre au chemin de sang
ciel que mourir consume
 
*
 
j’agrée
la fleur de nuit confuse
la pierre dense
où l’eau veille sans loi
 
j’agrée
le printemps en tumulte
la neige claire
l’aube mûre où je veille
 
*
 
la nuit broie mon visage
je saigne comme un fruit
 
*
 
à peine naissions nous au temps bleu de fatigue
que l’ombre nous brûlait de son mortel silence
 
*
 
ce qui me reste à vivre en ce lieu sans racines
est un jour de jeunesse où la lumière en transe
brave la nuit sanglante
où l’on écorche un frère au chagrin de salpêtre
 
ce qui me reste à vivre est un jour de jeunesse
que je creuse en secret au plus noir du silence
 
où j’arde
contre la nuit de honte
qui erre entre nos corps de boue
anse atroce où je veille outre naufrage et mort
outre vertige et croix
 
où j’arde
contre la nuit du piège
la fange triste d’être
ce jour médiocre et noir où je trébuche aveugle
sur les signes du crime où je trébuche aveugle
sur les signes du crimes où l’ombre nue déchiffre
les nostalgie de l’être au plus noir du silence
 
où j’arde
étoile au front
contre la frange d’être
en l’aube morte
l’espoir sans récompense où nous traînons le pas
vers la dernière auberge
l’ennui
le temps de suie
la peur d’être un visage
 
la mort
des solitaires
 
la mort
verger d’oubli où neige aveugle
la vieille nuit
où l’on se tait de peur au plus noir du silence
 
croulez palais de marbre
 
*
 
verdure saigne
jeunesse avance au front où l’on nous tissons nos lois
jeunesse brusque à la frontière
les vieilles nostalgies du sang
et l’herbe
monte à l’assaut du vivre
où nous rêvions
de vigne et d’archipels en fête
au plus noir du silence
l’herbe monte au pouvoir entre au palais du crime
brise le spectre
brûle leur code et leur légende
et parle
à l’heure où je m’invente
humain et sans autre âge
                                     que renaître espoir juste
à l’heure froide et nue qui sourd de nos étoiles
pour éteindre en la peur les spectres des tyrans
 
homme pris de vengeance dans la vigne de l'aube 
j’avance
            à pas de vigne
            à pas de neige
            à pas de grand soleil
            chanson de pluie patiente et feu de source
en l' herbe
 
 
j’avance
je suis au rythme clair où je connais les miens
nuit vengée par un astre
                                    neige à vivre au soleil
douceur rebelle au crime
je saigne d’être
nuit de laurier morbide homme au soleil de torture
tourné vers le printemps où l’astre nous écorche
et nous énonce
 
couleur
que la douceur vendange
 
                                    j’éveille une aube morte
                                    un cri de source en fête
                                    des yeux
                                    que l’on croyait crevés
                                    des gens
                                    que l’on croyait partis
faire un dernier voyage outre crime et distance
 
je saigne
à l’heure où votre force aile puissante d’aigle
incruste dans mon corps ses ongles de jour noir
la nuit prend feu
en vous
en nous
 
un autre prend ma place
et mine en vain l’espoir qui me servait d’asile
 
*
 
et maintenant
j’invente au vivre noir où sont passés les miens
en feu violent de source
un ciel de grâce
 
j’éveille une aube morte
des gens surpris de mort au soir de rouge absence
où nous étions sans être
 
la fleur qui tue les gens neige au gré du silence
comme un sommeil de mort entre les bras de l’aube
qui dore
au jour clair de voyance
le temps d’être un visage
 
nous avons faim de terre
 
soif d’un visage à vivre en lutte contre un arbre
contre un règne de honte
contre des gens de haine
nous avons faim de vivre un siècle à notre taille
 
jardins clos de blés mûrs au jour de grâce intègre
où soleil sans frontière
l’aube se farde et parle
                                    de notre temps de pierre
 
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2 –
 
l’absent
ruine l’arbre où la mort se constelle
 
en l’arbre où la chagrin
reste la pierre d’ombre au grand minuit de neige
la steppe
où l’aventure
travaille dans mon sang
et tisse
entre nous d’eux
sa fable
me reste à vivre l’ombre
où l’absent fait de nous front chargé de lumière
un absent dans la pierre
ce vieux silence
où je m’incarne
et règne
sur des loques sans joie
 
ah que ne puis je taire où s’est perdu l’absent
arbre au vertige tendre
vibrer guitare en peine en la nuit de mon frère
qui s’acharne à se taire
dans l’habitude d’être
ce grand feu souterrain pris de piège où l’amour
grande harpe d’eau vive
reste un visage à vivre
sur toute chose
outre frontière et larme où vibre étoile en sang
mon grand cri de révolte en tout vigne humaine
que le malheur vendange à l’heure de l’angoisse
et noie
de long chagrin
au temps fermé de brume
 
car dans la nuit fermée à ma douleur d’esclave
s’allume
journée sans crépuscule
un ciel de joie fertile
où le bruit le sang violent qui nargue mort fatale
et chante grave et beau plus haut du rempart
 
*
 
ah que ne puis je terre où s’est perdu l’absent
herbe au soleil fertile
fruit comestible et bon
douceur brûlée de soifs
tendresse nue pierre où veille une étincelle
veiller pour toi mon frère au refus indomptable
 
sortir de l’ombre froide où me parque le maître
chanter neige habitable au grand minuit de l’âge
où l’arbre flambe humain qui brûle en la fontaine
où sans perdre u oiseau et sans perdre un visage
l’eau vive boit le temps
où la douceur fait signe aux aigles du printemps
 
*
 
que suis je en ce verger où l’ombre sous vendange
où l‘on pourrit la joie qui explose au ciel grave
où l’on crache sur nous
aumône atroce
                        la mort
où le chagrin nous broie dans la cendre de l’aube
où l’herbe tresse un nom de larme un nom de fleur
un nom de vigne au sang mortel
 
un rêve
jour réfractaire
 
fleur d’écume et de rage en l’eau noire des jours
et que ne puis je luire
et puis
sortir de table un soir et vous laisser ma place
comme on quitte l’amour par un soir de septembre
 
*
 
ah que ne puis je enfin rompre la digue d’ombre
et voguer vers un monde où le printemps en joie
coudoie au creux des rues en fête
les gens
dépris du nombre triste
que l’éclair de mon sang au chant de fable amère
ruine au verger du temps où prime étoile en fuite
un enfant joue
parmi les chrysanthèmes
 
*
 
que suis je dans ce temps d’éclipse et de salpêtre
dans ce temps de couteau de peste et d’herbe noire
ô nuit de chanvre
vigne étrange
vigne étrange à ma terre
honte et linceul de glace
temps de haine arbitraire
 
silence
plus rien que le poids du silence
                l’envie d’être un nuage
plus rien que se nourrir d’écume
que taire en soi la vie
 
plus rien que nuit sur mon visage
que givre dense en nous
                        en vous
où l’herbe morte
prend à nouveau visage et chante
couleur du vivre où je vous aime
mais vous ne m’êtes plus 
                                        ô nains
que perle morte et nuit de fange
silence
où l’on se pleure
où l’on pleure un absent perclus d’être un cadavre
un enfant dans la pierre où nous dormions sans fin
 
la pierre
où nous étions de pierre
 
ils ne me sont plus rien les hommes sans luisance
plus rien
que perle morte et nuit de fange
terre au jardin de haine
                                    ô nains
vous ne m’êtes plus rien
qu’ongles crochus et ronce noire
scorpions fous de venin
et lande
où s’est perdue notre âme
 
*
 
ô nuit de chanvre
destin de feuille en feu au plus secret de l’être
 
*
 
comme une aube de neige aux flèches de printemps
où l’enfance était bleue sous la blanche cascade
il pleuvait dans la nuit astre fleur et chansons
et nous parlions parfois corps perclus de chagrin
 
nous parlions de la mort d’être un feu solitaire
nous parlions en secret des gens fous de distance
des nostalgies d’air pur du ciel fou de septembre
et nous vivions sans fin un autre âge où l’espoir
 
cheval fou de printemps dans la steppe en fureur
réveillait dans notre âme astre discible au monde
où pierre noire au cœur un homme au soleil âpre
avance à notre encontre et nous montre nos mains
 
nos mains pièges d’amour se sont fermées sans joie
sur l’ombre de vos corps de neige et de phosphore
en ce temps sans mémoire un temps fou de distance
où l’on trouait sans fin les corps pris de misère
 
comme un soleil en peine aux larmes de printemps
l’amour fleuri de neige ouvrait sa main patiente
et nous partions là bas vers la maison de pierre
creuser terre et légende en ce temps de pain noir
 
l’amour avait notre âge et nous étions sur terre
au creux de ce printemps qui brûlait dans la nuit
la perle morte au front des processions de haine
des nains pris de démence en ce temps de pain noir
 
veilleur pris de chagrin sous le poids du silence
moi sans âge que pierre et sans soleil que vivre
étoile en l’ombre sourde un cri brise en la pierre
givre où mourir me guette et distance où l’on tue
 
neige neige il est temps que la joie nous consume
l’amour garde notre âge et nous parlons du ivre
où nous pourrons glaner de distance n distance
notre temps de pin blanc au grand soleil de tous
 
comme l’herbe s ‘éveille au grand soleil de givre
pour se conter verdure aux yeux brûlés d’espoir
un coin de ciel en nous brise porte et fenêtres
et tue l’ombre du crime où la fleur s’épouvante
 
au front des gens brimés de brume et de ciel noir
un jour rebelle au crime ouvre en la nuit marâtre
son verger de pain blanc candeur qui nous répète
dans les taudis de faim où l’on meurt sans pardon
 
nous parlions de verdure aux arbres pris de froid
au temps noir du silence aux gens fermés au monde
et nous étions sur terre au ciel gris de septembre
un jour de source éclose au flanc du siècle en feu
 
nous vivrons un autre âge un jour plus nu que l’eau
douceur d’être un rivage où l’on oublie la haine
l’ancien mépris de vivre au plus bas de soi même
nous vivrons un autre âge au printemps sans rivage
 
comme un enfant traqué de suie et d’épouvante
s’arrête au bord d’un cauchemar et parle au vide
j’allais désert au cœur vers mon enfance en peine
pétrir de juste espoir les gestes fous de vivre
 
nous avions en commun la peur d’être un visage
la peur d’être un miroir au grand soir véridique
nous rêvions la distance où l’amandier en fleur
nous porte vers l’amour qui nous ramène au temps
 
où la couleur nous venge entre neige et verdure
des nains que nous avons surpris de juste extase
face au printemps serein qui nous change d’aimer
l’herbe neuve où la mort cesse d’être un supplice
 
nous rêvions la distance au soir de pluie subtile
et nous gardions pour nous neige au cri de verdure
le fruit d notre espoir la joie d’être un visage
la joie d’être un miroir au grand soir véridique
 
comme un cri de fontaine au plus cru de l’enfance
nous remontions le temps vers la source de chair
vers la grâce des blés vers la mer sans relâche
au cœur mouvant du jour où le chant nous reprend
 
 
distance
distance entre notre espoir de fable
entre nos mains de chair
 
distance
à fleur de terre
dans notre danse
ombre ecchymose et larme
eau stagnante où je meurs d’être une eau solitaire
qui descend vers la nuit
vers le froid du silence
prendre racine et vivre
neige qui s’ouvre au feu de ce printemps si grave
que nous cessons de luire
 
je saigne
dans les taudis de faim
je saigne d’être
ce corps troué d’espoir au temps de mort altière
 
chaque fleur que je vois laisse en moi sa lumière
chaque terre où je passe
                                    laisse en moi sa verdure
 
*
 
je viens
des jours perdus
des jours glanés dans le silence
des jours vécus dessous la terre
des rues mortes de froid
 
je parle
je ne crains pas de vivre
                        de luire
au plus triste de l’être
 
je parle
 
terre au soleil de chair dénoue la nuit de cendre
dénoue tes mains de joie ton grenier de sel blanc
 
ouvre au jour qui se lève
routes de nacre au clair de lune
routes de givre où l’on se pense
homme au soleil en ruine
soleil en terre
jour troglodyte
 
je parle
j’interdis que l’on tue
que l’on porte au soleil le temps des yeux crevés
que l’on oublie le chant qui nous suscite à l’aube
 
j’interdis que l’on tue
que l’on mène en servage
l’homme qui rêve d’astre
la fleur qui use l’ombre
herbe qui monte et fleur de grâce
enfance au ciel de nacre au goût de mûres fraîches
au cri de source
 
*
 
enfance
rebelle au crime
au feu noir des scorpions
 
enfance
où nous dansions l’amour
 
*
 
j’interdis que l’on tue
braise qui parle sous la cendre
au soir violent qui nous incise au cœur sa nuit
sa peine d’astre
honte à vivre sous terre au cri de source inquiète
mort promise au soleil de nos vingt ans de grâce
mort pour un nom de fleur
orange en fuite au large
 
*
 
la boue conspue un astre
 
*
 
homme en fuite en la mort parle au dernier soleil
 
*
 
merci vivre est ce chant qui nous mène à la terre
à l’arbre
au chant natal
chanson de pluie martyre heure morte à l’horloge
un train est en partance hors de la nuit de lèpre
 
prenons y place
 
vivre est ce chant mortel qui nous porte au soleil
 
 
*
 
comme au soir de fatigue où les miens sont restés
comme un peuple de nains dans la nuit sans parole
comme une étoile en sang dans la nuit sans rivage
comme une perle au front
aube où je meurs en fête
rose qui s’ouvre au soir de notre automne d’encre
fleur de misère en croix
comme un matin de cendre
comme un miroir sans âge
comme on se tait
comme on se noie
de peur d’être un miroir
de peur d’être un visage
l’espoir perd son pouvoir de lumière et de roses
de tendresse et de pain
 
*
 
la peur entre en vigueur
la mort rougeoie
l’aube se farde
et l’oiseau qui s’éteint nous laisse dans la nuit
où nous crevons de froid de rage et d’impuissance
à flanc d’abîme
ordure au cœur
comme au soir de fatigue où l’hiver nous attaque
 
 
*
 
source d’ombre et miroir au plus secret de l’être
je saigne sur l’asphalte où la mort nous enivre
je saigne dans ces corps de chair et de beau temps
dans ces corps de soleil que l’on foudroie de peur
 
*
 
j’ignore
quel cri d’azur me hante
 
pour miroir un ciel ivre et pour faste une étoile
 
j’ignore
quel cri d’azur me hante
 
*
 
 
3 –
 
parole
à toute pierre où veille
un feu fragile
un feu
où se crispe une enfance
dans la rue sans pardon où se dresse un coupable
adulte
d’être silence et larme où gît puissance d’aigle
l’amour qui nous énonce hors de la nuit de craie
où tente d’être humain au plus bas de l’horreur
le songe vrai de vivre au grand ciel de l’amour
 
parole
pour le splendeur future qui me mange à ma table
pour la couleur subtile où notre espoir de vigne
délivre un oiseau clair au jour où l’on trébuche
au seuil pur de l’amour qui nous invente une âme
un verbe à vivre
 
parole
au long chagrin de pluie
qui veille au dur miroir où luit le cierge absent
qui nous captive en clair
et nous conte en secret son beau visage en cendre
 
parole
pour la mer qui commence à chanter notre errance
au grand ciel sédentaire où l’amour nous égorge
 
parole au jour présent qui marque d’une étoile
l’âge simple où je vois dans la rose essentielle
un temps de neige douce
surprendre en mon espoir de vigne
                                                    le ciel chagrin
                                                    la mort hirsute
qui chante en la hauteur où je veille en silence
le temps
où nous saurons planter nos gentes lois
 
parole
contre la fange ignoble où traîne en l’aube sale
un mendiant sans visage auprès du temple aveugle
en nous
que le vent tue
de sentir dans le soir passer ce froid lugubre
 
 
parole
 
je traîne en vain ma soif dans ce désert d’épines
où ma force est ce temps que tourmente une étoile
où je m’invente humain
parmi la pierre
où gît l’éclair de sang que notre âge de plomb
comprime comme un cri d’augure
où la joie nous éduque et nous livre au soleil
 
parole
qui se glisse entre nous au plus triste du songe
aux lèvres de l’intruse
 
parole
où j’interroge une ombre
fantôme aux ongles noirs de sang
pour la source où je bois sous la pierre d’ennui
la peur fatale
d’être une aube d’oubli au grand miroir de haine
où l’amour nous remplace aux lèvres de l’intruse
la femme
au dur chagrin de pierre
qui enlace un squelette au cœur noir de l’hiver
et pleure auprès du feu qui monte à son secours
et nomme
ton cœur de chêne altier
 
parole
reste un visage où vivre nous console en silence
des plaintes de l’absent qui erre dans nos rues
en notre vigne
dans les vergers spoliés par la crapule en armes
 
ah quelle odeur d’orange
brise ma nuit de chanvre
en mille éclats de songe
en mille éclats de perle
où je m’oublie en l’âtre
des nostalgies du temps
 
*
 
j’entrevois dans la nuit
des spectres dont le nom m’échappe
corps rongés de salpêtre
dans la mort fratricide
 
ô temps de lèpre
où j‘entrevois des gens mordus de faims étranges
                                              de soifs démentes
d’azur en fièvre
 
                                          des gens
                                          fruit de colère étrange
                                          surpris de haine
 
où sont les miens ce soir
                                        dans quelle ombre de sang
                                        dans quel piège d’ordures
                                        troublés par quelle idole
                                        rongés
                                                    par quelle étoile
 
où sont les miens ce soir
 
de quels siècles de haine avions nous donc besoin
 
la nuit parle d’énigmes
la nuit délire
 
 
*
 
dans la fuite de l’astre au soir pris de violence
la mort saccage un homme au ventre froid de faim
 
on tue
l’oiseau serein
de notre claire enfance
 
enfance
qui savait que leur nuit pouvait mordre le chant
 
un homme
un grand visage
qui chante dans la ville aux arbres nus de givre
éclaire en nous
la seule issue où vivre est un printemps à faire
 
*
 
mais vous pressez le pas vers un lieu sans excuse
dans la rue sans fenêtre
                                    où vivre
                                    est un monceau de glace
cendre de l’aube en ruine où je n’étais personne
 
dans la rue sans mémoire où je travaille à vivre
où l’ombre nue foudroie
les spectres de gel noir traqués de nuit cruelle
je ne peux plus me taire
 
je ne peux plus me taire
face au soleil sournois qui se glisse entre nous
comme écharde où la mort tisse en secret son nid
 
je ne peux plus me taire
un homme
aux yeux crevés de haine
chante au coin de la rue
pour prouver que l’espoir
est un feu sous la neige
où nous
martyrs de l’âge ignoble
qui nous combla de honte
creusons la nuit de cris
 
que faisons nous ce soir sur l’asphalte du monde
 
dans le dernier silence
un cri cherche le monde où nous souffrons de vous
orges noirs de l’enfance au travail de mort noire
que je croise en secret dans la nuit démentielle
où nous traquons le dire
à ton exemple
mère agile de tendresse
 
mais l’herbe du silence où nous restons de pierre
porte un éclair de mort qui nous assigne un songe
un songe au lent travail de grenaisons où l’astre
nous assigne en la haine où se défont les pièges
un lieu de pierre atroce où les miens sans espoir
sont nus d’effroi mortel
                                    crispés
                                    blessés de neige acarpe
                                    vaincus de lune étrange
un songe
de houille en larme noire où l’ombre s’épouvante
 
*
 
je chante porte ouverte aux hommes nus d’effroi
je suis né dans un temps de mépris et d’insultes
j’ignore
dans quel hiver sordide se sont perdus les miens
dans quel antre de haine se sont brûlés nos âges
dans quel feu de révolte nous avons pris au monde
                                    le droit
                                    d’être un visage en fête
un chant de transhumance
                                     qui pleure nos partances
et nous raconte au monde entre la neige et l’âtre
 
l’ombre éparse en la vie qui nous colle au visage
ruine d’absence un corps au cri de rouille infâme
et mord l’amour de givre
 
ô corps surpris de brume
au grand matin de cendre
où nous perdions
le sens
de la couleur des choses
 
*
 
j’échange
outre nos soifs d’étrange
un oiseau blanc de givre contre un siècle de haine
contre un miroir de fange
en terre
où le printemps se nomme
fruit de mort coutumière au grand soir de révolte
sans ce poids de frayeur où le temps en poussière
reste une plaie de lèpre
 
 
4 –----------------------------------------------------------------
 
un homme
ouvre sa main de graines
et parle
 
paix au soleil en cendre
 
paix au soleil qui naît dans le printemps en fête
 
ah que vivre est mortel en ce temps de ciel noir
dans cet hiver si morne que ma force s’effeuille
 
paix à la fleur astrale
ombre au cri sans rivage
la mort berce un oiseau qui nous habite d’ombre
et nous passons de rêve en rêve
au monde simple
où vivre est un visage au ciel pris de couleur
 
paix au peuple en voyage dans les ruines du temps
qui nous mange nos mains nos cris et nos légendes
et nous range en la nuit de son troupeau servile
 
paix au soir de vendange
grand courage qui saigne au rythme de ses danses
beau chant qui se résume à l’instant du scandale
astre au cri incendiaire
qui brûle dans le cœur l’ennui pesant du vivre
et les chardons châtiés à l’aube
dans la joie de nous dire astre au cri de revanche
 
paix au sommeil de l’arbre où s’invente un oiseau
qui chante outre l’amour le long siècle de peine
où pierre d’ombre en l’âme nous pleurons sans fin
grâce et neige où l’antan ouvre nos jours fermés
 
paix au sommeil de plomb du travailleur hirsute
qui saigne dans la nuit de glace
et passe
rongé
par les étoiles
au nœud coulant du vivre une espérance en croix
 
paix à l’homme en chemin qui explore en silence
l’humain
le plus grand continent
l’humain
que trouble toute chair qui nous révèle au monde
un homme qui s’absente dans la forêt des signes
 
un homme est en chemin des armes dans les mains
pour guérir de la haine et de mourir sans trace
à l’heure où les oiseaux se font signe au soleil
chanson
à rendre flamme et joie au bloc de pierre noire
que nous devenons tous dans l’oubli des étoiles
 
paix au feu qui travaille un cœur de vendangeur
comme au fruit lumineux de la plus haute branche
qui luit loin de ma soif de voyageur sans astre
beau fruit de givre noir qui tombe dans ma main
par un jour de vent âpre où le peuple s’invente
 
paix au visage en croix pris de torture infecte
qui regarde à travers les mains de son bourreau
l’aube grandir
et luire au loin la source claire
où nous aurons le temps de nous laver de l’ombre
 
paix au peuple frileux surpris d nuit violente
qui crache en l’aube mûre un sang de mort vécue
dans la poussière amère où l’arbre sans défense
rejoint dans la douleur ses vieux frères brûlés
 
paix juste
où vibre astre en voyage
l’espérance au combat qui se dresse en la ville
et monte vers la place au plu haut de la joie
où l’accueille le peuple aux vertes certitudes
 
où la douleur prend feu
et s ‘affirme en la nuit
douceur possible à tous les âges
où l’homme est ce destin qui ordonne le monde
 
paix à toute herbe jeune à toute fleur de sang
à toute gloire en fête
à toute joie terrestre
à toute fleur d’amour
à tout homme sur terre
qui se décide à vivre au plus haut de soi même
 
paix au soleil qui naît sous la poussée du sang
orgueil simple et fragile enfance et nouvel âge
chanson de pluie à vivre
dernier mystère à rendre
clair à chanter ce monde
premier chant de racines
où l’innocent grandit sans nul outrage d’ombre
et scande
au rythme du meilleur espoir
un jour de neige à vivre où prie un oiseau bleu
 
paix au soleil qui monte arbre au vertige humain
où vibre étoile en acte
l’oiseau qui se répète enfance
dans la journée lucide où chante un travailleur
 
paix au soleil qui naît malgré le sang l’ordure
la peine d’être
que laisse en son chemin le bourreau sans visage
de ne plus être au soir où le peuple se crispe
l’éclair atroce et bleu qui ronge notre espoir
dans les ruines du crime
 
je grandis dans un geste
 
je chante en verger clair l’âpre désert de vivre
et donne
terre fertile au siècle
qui s’abreuve en nos yeux gagnés de jour utile
et résonne en tout lieu de neige et de justice
où le peuple a franchi les frontières du crime
 
terre fertile au siècle
soleil
que son travail suscite au plus haut de sa geste
où le ciel est plus clair que la blanche cascade
qui ruisselle en sa main et se change en lumière
 
paix au travail de tous
journée rugueuse à vivre
terre armée de confiance
travail
que brûle un maître froid pourri de mort infecte
je meurs triste habitant d’une étoile en déroute
 
paix à la ville claire au ciel fou d’hirondelles
je reste
éclair de sang
la joie des lendemains aux spectres fous d’azur
qui s’éveille en vous tous dire la nuit nuptiale
et vous colle à la peau comme un reste de lèpre
 
que la mort reste au loin cendre la bouche nue
et que l’herbe se nomme herbe au printemps serein
il passe en moi fébrile
la peur d’être un fantôme
la peur
où nous perdons le signe
le sens du signe qui nous nomme
peuple au soleil blessé de grande lune étrange
qui partage avec l’aube
le pain chaud de la joie et nous somme en secret
de luire
hors de la mort néant triste et confus
pour prouver que l’amour est le meilleur partage
 
paix à la source amère au long chagrin de pierre
qui sourd de ma démence d’arbre au vieux tumulte
et pleure en nous sa joie
grande flamme en charpie où notre ancêtre pleure
d’être larme et silence
oiseau lucide et franc
fleur à sauver de l’ombre au refrain de couteau
où notre astre luisant entre des mains de fable
reconnaît le printemps qui saigne à la fenêtre
 
espoir
jardin surpris de givre
délivre
un chant d’oiseau mortel qui multiplie nos mains
dans la promesse d’être un faste à notre taille
 
paix à la vigne en sang où nous dansions l’amour
comme herbe sous le vent au cri d’étoile en sang
où la couleur nous parle en l’arche du printemps
des grâces que l’amour nomme au jour qui se lève
 
paix à vous bonnes gens que la lumière espiègle
enferme dans son cercle où l’arbre humain côtoie
mille étranges démons jaillis des steppes noires
où nous errions sans halte au temps de notre peur
 
terre à vivre en silence ouvre en nous son matin
 
paix à vous bonnes gens corps surpris de silence
qui rentrez dans la nuit où l’espoir vous allume
vous qui parlez de nous au soir de transhumance
où l’ombre ennuie le sang dans le jour troglodyte
 
paix à vous bonnes gens que l’on traque de haine
que l’on tue sans regret au flanc du siècle noir
ombres de neige humaine au grand espoir de fable
vous qui parlez de nous dans l’herbe du printemps
sans croire à la laideur qui nous masque de brume
en ce temps de ciel noir où l’ombre tue le chant
 
tissons
tissons d’amour un songe où n’entre pas la haine
ô neige qui nous brûle au soir de feinte ivresse
où l’on saigne de peur prés de la source éteinte
 
tissons
tissons d’amour un songe où n’entre pas la haine
qui rôde autour de nous comme un spectre de sang
 
paix à l’herbe engourdie dans la nuit sans rivage
paix à la ville en croix sous le sac et la cendre
paix à l’abeille en joie au miel heureux de vivre
 
la fleur brise la pierre
la fleur gicle du nombre
 
la vie gronde en la houle
qui nous emporte au large
 
l’enfant cherche sa mère
engloutie dans son ombre
 
la suie perd son courage
j’écris vivre en la mort
 
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