CHEMINS - 01 -
01 pour Aline Audin
01-
*
être avec toi un jour
un jour au long secret de perle perdue dans un désert de sable dans une
enfance en fête au soir de givre humain dans un vivre possible coupable d’être
chair en peine migration d’astres à flanc d’abîme atroce neige interdite en
l’amandier en fleurs soleil âpre et silence au cœur de notre ville au cœur du
vieux parloir au cœur de notre chair à flanc d’espoir en croix neige interdite
et suie de peur terre ignescente au cœur de notre cœur étoile en fuite en
notre vieille image vers un pays en paix où la lumière exulte.
être avec toi un jour
veillons à vivre
mémoire en fête au large où sont passés les aigles de l’enfance l’arbre se
courbe humain on tue un homme à coups de hache mort que je nie flamme au
visage de mon frère pauvre désert et nuit démente qui s’acharne sur nous et
nous sépare de nous même hiver sans âge hiver au soleil noir miroir sans teint
au ciel atroce vacarme où l’on ne pense à rien où l’on entend que soi vivre et
mourir en l’herbe sur le trottoir d’autrui qui règne sur sa terre et nous
expulse du vivre simple où tout serait facile aux arbres de la ville.
02-
la ville
elle est en nous
en
notre danse au creux de l’aube
en
ses méandres
où
nous vibrons de terre en terre au ciel étrange
où
nous tissons de terre arable
un
être
elle est en nous la ville.
03-
*
veillons à vivre
neige au déclin du vivre où nous aimons l’espoir
qui ose en nous sa geste
qui ose autour de nos cadavres prendre visage au soleil
tendre remplir de sa rumeur secrète la ville antique où j’ai connu les tiens
au temps de l’innocence des illusions des lentes promenades du bon silence où
nous aimions cœur pris dans la verdure nous perdre au cœur des choses de la
terre au gré du feu au gré du vent qui nous menait vers la lumière stable vers
l’herbe d’être jeune dans ce monde de pierre où l’on reste un infirme au ciel
poignant de givre à l’herbe sèche et noire au feu mortel qui laisse en nous sa
cendre impie sa peine d’astre en sang en ruine où l’on reste un infirme un pas
qui traîne sur l’asphalte en feu des gens sans feu ni lieu sans âtre et toutes
nos raisons de vivre et de mourir en croix au temps de meurtre et de sanie où
je suis un fantôme un cri perdu dans la tempête un dernier feu qui râle hors
de la mort en pleine vigne au cœur du vin à sa racine hors de mort en fête en
plein soleil en fête en plein visage en fête hors de la mort où je suis un
fantôme un homme hors de son règne humain parqué dans l’enclos noir du maître
sans histoire ni légende perdu loin de la source en feu et du jardin en fleurs
loin de l’éclair d’eau vive qui chante en ton visage.
04
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*
veillons à vivre
neige au déclin du vivre où nous aimons l’espoir
qui
ose en nous sa geste
son vieux courage
qui ose en
notre vivre simple face au malheur de fonte sa force d’arbre au soleil juste
sa joie son rythme d’être son horizon limpide outre meurtre et silence outre
honte et servage outre nos yeux fermés sur la couleur du crime qui nous cerne
de pluie de sang de mort hirsute et noire horreur en notre argile blanche en
nos étangs de lèpre où l’on nous change en gnomes où l’on nous jette au cœur
l’âpre vendange des hommes sans langage et sans légende au cœur.
*
terre où la nuit me forge un temps de neige atroce
je veille en arbre
en
ancre
en
peine étrange à fleur de terre et je te parle de notre temps de pierre douce
au cri de harpe où l’arbre en peine explose enfant de givre humain enfant de
terre claire en proie au temps qui passe en nous qui ne savons plus rien des
jours vaincus de neige étanche de mort secrète où nous n’osons plus rien
contre la nuit de pierre qui vaque à sa besogne horrible au cœur du temps où
l’on déforme notre plus beau visage mis à l’index excommunié d’emblée à cause
de sa lumière d’astre de son miracle humain de son projet terrestre de la
splendeur future qui se raconte au monde aux gens que sa douceur espiègle
éprouve et porte de rivage en rivage en terre où l’arbre en peine explose
enfant de givre humain enfant de graine avide de soleil en mal d’être un
visage en mal d’être une idole en mal d’être un poème
d’être
un nouveau langage un feu dernier chemin vers notre image vers notre règne au
soir de neige où l’arbre humain délire d’être une ombre de sang un feu dans la
campagne éteinte où sont passés les nains les égorgeurs du vivre où nous
savions parler de l’astre et de l’esquif entre les mains de l’ombre en nos
couloirs de vigne où nous dansions à tour de rôle heureux d’être en la nuit du
piège une aube en sang au chant de la splendeur future où nous parlions
parfois de la prochaine escale au feu patient de givre et de chansons en
fête.
ah souvenirs
de neige claire et de vacances en terre en l’allée de cyprès couleur du vieux
chagrin en notre ivresse âme aux otages crucifiés là bas au creux de l’aube
intense où nous étions visage en âge d’être en l’altitude un cèdre au soleil
jeune.
j’ouvre en la nuit du piège une aube à fleur de terre
un temps de neige en croix silence en l’arbre en feu
où nous parlons du vivre
du givre
où l’astre veille humain et nous annonce au monde
*
j’ouvre en la nuit du piège une aube à fleur de terre
à fleur de neige
à fleur en peine
clairs souvenirs
de neige claire en nos vacances
ombre où j’oublie hagard
mon frère
au long secret de graine
son ombre en joie au ciel étrange
sa peine d’astre au cri de pierre
au long piège d’asphalte
clairs souvenirs
*
enfance
où nous tissions en fleur de givre humain en soir de chant allègre le temps
d’être un espoir en feu d’eau vive en voie d’être une école où prend forme
l’augure qui nous porte au soleil vers la place au grand air qui nous enferme
ensemble.
enfance
où nous montions nous dire au monde au siècle en sang aux jours perclus de
givre et d’arrogance au temps de pierre et d’ombre impie au feu mortel et noir
où je m’absente de la ville qui me surprend de haine acarpe et de ciel vide où
je contemple l’astre.
enfance
je m’interroge
j’interroge la pierre au secret de fleur noire cri de squelette de spectre
hâve au feu noir de scorpion cri de squelette hâve aux menottes de barbelés
lumière en croix parole acerbe larme figée où l’on retourne vers la terre vers
l’ombre tutélaire où l’herbe nous attend verdure patiente.
je m’interroge
enfance
j’ignore quelle nuit se grime au flanc de mon angoisse au creux de mon silence
chanson d’étoile morte en nous mais flamme nue dans ma ténèbre ardeur de givre
au creux des rues en fête où vibre étoile en fuite au flanc de la montagne un
grand feu de berger fermons les yeux et laissons paître au loin le lent
troupeau d’étoiles qui nous emporte au large.
enfance
où nous partons nous dire en transe au monde la pierre éteinte sur son secret
de louve errant au long du temps au long secret de sang prés de l’asile humain
louve éperdue dans un délire d’astre où solitaire un homme veille et nous
protège des spectres du chagrin qui traîne son silence son vieux silence en
nous au cœur gercé de givre.
je ne te dis que l’essentiel
sans tricherie mais je m’oublie peut-être à converser avec
moi même en ce minuit de pierre où je me conte à toi de toutes mes
racines.nous rompons la distance tout ce qui nous sépare en ce temps de mort
noire
enfance
ardeur de givre encre au projet subtil
nous apprenions la terre le bleu de la montagne le chant le
vent dans l’arbre de la science où nous perdions nos premiers yeux l’éclair de
l’amitié possible outre frontière et danse entre vivre et mourir sous
l’amandier en fleur à la veille du printemps qui vibre encore en notre espoir
au cœur du cimetière que l’intégriste ravage au nom de son pouvoir de sable et
de sa rage de néantiser le monde la joie de vivre au soleil clair de l’être où
nous pleurons la source qui gicle de la pierre d’ombre et nous oublie.
enfance
premier dernier chemin en croix dernier soleil en notre quête simple en notre
forge où nous plions dans l’ahan de coutume le fer à notre usage au gré du
songe et de l’avoir malgré les maléfices les sortilèges de l’ombre malgré la
vieille nuit qui gèle en notre corps la joie d’être soi même un âtre au cœur
de la maison natale un feu dernier soleil en notre quête d’encre de laine
brûlée au goût de sel pour verbe coranique en notre quête d’arbre et de racine
d’atome et de planète en quête du vieux soleil derviche qui erre à ma
rencontre en ce temps d’herbe noire où l’intégriste nous bâillonne et nous
étrangle afin que nous mourions sans cri au cœur du temple où l’arbre se
prosterne humain vaincu de givre fantôme au creux des rues depuis mille et
mille ans d’horreur de lèpre atroce au sang cuisant de rage intérieure de
leishmaniose de joie spoliée neige interdite science au parloir de la question
sorcière que l’ombre brûle vive serf en la nuit de peur premier dernier chemin
de croix silence la sainte exhibe sa couche de crasse fantôme au creux des
rues depuis mille et mille ans d’horreur de neige noire temps noir où la
religion infecte l’homme sanctifie la misère lui donne un sens mystique
confisque la parole déclare guerre à la chair parque la lèpre près de la mort
écrase l’être humain condamné par l’initiale faute règne contre nature nomme
rebelle et satanique la simple joie de vivre terrifie le monde par un an mil
de fable et puis passé l’an mil sans fin du monde instaure le port de la
rouelle et le premier ghetto croisade sur croisade fleur prisonnière peste et
silence pape infaillible qui autorise l’esclavage pane y vino l’eucharistie
change l’azyme en chair le vin en sang saigne pauvre jésus le supplice
poursuit sa victime après la mort on nous enterre on nous déterre on expulse
du cimetière on nous refuse la sépulture.
brusquée trahie chargée de chaînes mise en vendange la vie est prise au piège
mise au carcan mise en cellule mise au sépulcre brûlée prise d’ombre et
d’épine foulée à terre gardée sous terre rongée de lèpre et de vermine mise en
croix la vie est prise au piège mise à l’encan vendue au marché noir souillée
on y vendange à tous les coins du monde un frère au soleil libre on y cultive
l’ombre on y tue l’espérance le maigre espoir qui germe au long du temps qui
pèse en nous sa haine qui nous amasse en gerbes de toutes les couleurs la vie
est prise au piège où l’intégriste égorge dans sa ténèbre infâme un homme au
soleil jeune un frère un beau visage l’astre qui nous éclaire dans la pierre
d’ombre que nous portons au cou la pierre où la mort creuse un nid.
la
vie est prise au piège que l’intégriste érige en croix où l’on me cloue face
au chagrin du monde que mon supplice hante dans la nuit de suie la vieille
nuit de peur où je reste un fantôme errant au creux des rues depuis mille et
mille ans d’horreur et de mort noire.
*
la vie est prise au piège
bourrée de mort
on y vendange l’homme au long de l’âge
on l’estropie
on l’atrophie
on y crée de la haine on pétrifie on sclérose l’amour on
change en ombre la personne humaine en zombie en fantôme mon frère au
merveilleux pouvoir mon frère que l’intégriste égorge
au nom de dieu
au nom du bien
au nom du ciel
au nom de rien
mon frère que l’on brûle aux yeux du monde entier que l’on
écorche au cœur aux yeux de tous.
la pluie gerce les corps des hommes pris de haine
des gens surpris de peurs
frayeur subite au corps
misère
au soleil triste
ce sont les créateurs de haine
les chiens à face humaine
qui font de nous ces gens perclus de pierre atroce
sur l’asphalte où la mort est notre droit de grève .
la pluie gerce nos corps nos yeux troués de haine
mais nous ne tairons pas le chant appris à l’aube
nous ne tairons pas
nous chanterons contre la nuit
pour la lumière
*
et puis un jour
des gens de peu des gens de rien des gens de terre des
centaines de gens des gens de toutes les couleurs des fous et des poètes des
êtres merveilleux
et puis un jour
des nains des hyènes et des loups des prédateurs de la
splendeur de vivre le vide la conspiration du silence l’angoisse on
s’interroge on multiplie les questions et le jeu se prolonge on se découvre
coupable de quelque chose dont le mystère nous hante à un tel degré que l’on
risque à son tour de se taire défait vaincu par ses propres fantômes :
quelque région fertile en joie source bavarde dans un coin de l’être se trouve
soudain prise de sécheresse gorgée de sable. on s’y enlise malgré nos
convictions nos certitudes notre confiance en l’autre morte on s’y enlise et
la tentation de fermer portes et fenêtres et de clore à jamais le livre
merveilleux de l’amitié possible outre frontière et fêtes guette en nous le
moindre signe d’abandon. on sent que vivre ne sonne plus comme l’enclume
claire des forges de l’enfance mais patauge en la boue noirâtre de l’impasse
où plus rien ne s’invente mais l’espoir nous sauve malgré nous.
et puis la guerre et le travail sournois des créateurs de
haine la famille frappée à mort la persécution constante et puis un jour après
la paix après l’espoir le sang la barbarie atroce la religion qui se sclérose
les amis que l’on tue l’exil hors du beau temps la vie risquée à tous les pas
la peur la peste le malheur nous limite et nous taisons nos cris. ça rogne la
pensée ça censure les élans du cœur ça tue à froid. on se limite on n’ose plus
sortir de sa coquille d’ombre et des ordures de la veille même si la nuit nous
herse.
*
je suis resté fidèle à mes images de naguère
je vis hanté de souvenirs et de visages aimés que j’évoque
parfois au gré du temps mais que d’images mortes au souffle de l’hiver et que
d’amis perdus sous terre frappés de main barbare de main déshumanisée de main
cruelle et de torture insoupçonnable
je vis de rien je meurs de rien.
un rien me tue mais un rien un autre rien me ramène à moi
même au beau temps au vivre simple où la parole engendre la parole conquiert
la parole et va rejoindre chez l’interlocuteur la région dont elle émane
secret partiel de toute poésie.
avec toi je renoue avec une parcelle de moi même que je
croyais non pas morte mais enterrée vivante sous un monceau de nuit de glace
et de lourdeur méchante. je renoue avec toi et c'est assez d’être soi même
hors du silence hors du chagrin sans nom des plages du malheur d’être un arbre
oublié des oiseaux et des feuilles maigreur stérile lumière hors d’usage
désert de pierre de vieux silence où veille en l’amitié profonde le feu
l’éclat du souvenir que rien ne lasse : miroir de nostalgie qui nous
ramène à l’aube où nous étions dans le plus vieux secret la joie que l'on ne
conte pas.
[voir éditions Tirésias}
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CHEMINS 1--05 -- pour Aline Audin.
Verdure sonne au grand soleil en armes.
01
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*
verdure sonne au grand soleil en armes
la nuit coudoie la mort
et
nous passons
et nous mâchons une herbe amère qui sème en nous l’oubli qui neige en notre
deuil en notre nuit de peur où nous nous éveillons au dire intense qu’il nous
incombe de prendre en charge
afin
d’être un visage
un siècle de beau temps de minute en minute mille ans de certitude à chaque
aube nouvelle sans changer de chemin ni de lumière en proie au vivre humain
au
temps de ronceraie aveugle qui nous brime en silence sans connaître nos jours
pétris d’ombre et de sang où nous nous sommes pris dans la chanson de l’aube
où l’arbre se prosterne esclave au pied du maître obscur en son naufrage à
portée de la terre.
*
verdure sonne au grand soleil en armes
la
nuit soudoie de mort et d’ombre nue
la
neige
et
nous passons
vers l’arc en ciel sonore où l’on inhume un astre un pauvre corps vaincu par
une étoile morte en temps servile riche en combines d’ombre louche et de
lumière au cri d’orange simple et de frayeur multiple qui nous hante d’enfance
au soir de nostalgie
où
nous luisons en terre réfractaire
contre
la nuit infâme qui nous cherche sous terre et nous découvre en l’arc en ciel
sonore au vieux palais de cendre où nous parlons de neige et de palais futurs
en notre langue d’âtre au flamboyant visage.
*
la
nuit coudoie la mort
et
nous passons
graveurs
du chiffre en fuite qui nous ancre en sa danse au cœur du vieil automne qui
frissonne en nous en notre vivre
et
nous marchons contre l’ombre où suie et cendre sur nos
têtes nous épelons de juste orgueil notre espoir de soleil qui s’émerveille et
nous fait don de l’astre que nous avons au cœur de notre cœur.
et nous éternisons
l’amour
qui porte peine et joie en notre lieu de fable au grand
soleil sonore.
02.--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
*
l’ombre qui pense à nous et nous subreptice nous embrasse et nous annonce au
jour de terre au grand soleil qui engendre et nous éclaire et porte notre
chant d’espoir et notre ombre d’angoisse au plus secret du vivre où nous
sommes parvenus à force d’être en notre blanc silence au règne d’arbre
clair qui vibre vers l’humain que nous savons possible hors de l’horreur
possible à tous les pas où l’ombre saigne en l’équinoxe qui nous rend nos yeux
notre équilibre dense le vieux poème que nous savons par cœur fleur fugitive
qui s’esbigne et nous ancre en amers et nous ramène au port où nous chantons
la terre l’assise et la merveille la même phrase en nous en notre corps qui
s’alimente d’écchymoses de salpêtre qui nous marque de bleus.
03.
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*
l’ombre qui pense à nous s’égare dans la ville natale et nous escorte hors de
nos vieilles rues d'or hors du vacarme de l’enfance au cri de joie rebelle au
ciel fou de nuages en notre transhumance vers l’éclat de la steppe au
vivre incandescent de perle dés la première ondée où nous longions le vieux
rempart français que nous creusions de trous pour investir la ville et nous
étions dehors dans l’arbre subversif notre premier maquis contre le vieux
silence où nous germions contre la loi du maître qui lâche contre nous ses
chiens ses torches de démence ses pendaisons ses pelotons d’exécutions au
creux de l’aube infirme qui guette encore au ciel sa pluie de rouille
amère dernier baiser en l’herbe noire du chagrin qui nous enivre et
laisse en nous sa mort son vieux troupeau d’ivoire qui tombe en ruine sèche
prés de la source morte qui ne reflète désormais aucune image humaine sinon sa
vieille mort sueur de sang et dernier cri vers la lumière que nous avons
perdue en terre de tyrannie lugubre en rapts de jeunes filles et de trésors en
croisades sans nom en ghettos pour les juifs en voleries de tous les noms en
anthropophagies en mille et une tueries de jasmins et d’eau vive au jardin qui
se cache pour mériter de vivre dernier asile en l’herbe quiète qui nous ouvre
au soleil et nous chante l’amour la fleur de l’impossible que nous portons
dans l’altitude aire d’aigle et chemins gardés d’épines blanches de mort
courtoise qui nous ouvre au vivre dense et nous ferme les yeux et nous étonne
de printemps subtils où l’arbre lumineux qui protège notre ombre nous garde en
ses racines torves de souffrance amère en notre orangeraie qui rayonne en la
mort et nous ouvre au parloir la grille du silence.
03
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*
fatigue en croix
hors
de la ville éteinte que je n’habite plus et qui n’est plus que morne
labyrinthe où se sont assemblés en cercle sur la place assis à même terre
barbes et kamiss hideux de transparence obscène de pauvres gens
perdus
hors
de l’histoire en guerre contre leur triste image contre la vie qui ose encore
se dire herbe rebelle et sûre de son prestige d’astre au front de la jeunesse
qui hurle contre la vie et se préfère vengeance
contre le père pourri de corruption infecte d’ordure en la conscience en croix
jeunesse qui ne sait rien de l'aube assasinée
confisquée dans la joie comme butin de guerre jeunesse qui ne sait rien de
lorca en son jardin de grenade rien d’el halladj rien de baschar au long
supplice d’écorché brûlé vif rien de sa cendre répandue dans le fleuve rien de
djaout en son miroir humain en plein espoir de vigne rien de djihal au
merveilleux sourire qui brave l’avenir des hyènes rien de lounés qui multiplie
les siens et les oriente vers l’avenir du juste qui nous hante rien de
djahnine morte sous les yeux de ma fille stylo et feuille jaune en mains rien
de yefsah chemin de jour verse la parole conquise de juste ardeur portée au
large vers plus ample rivage rien de mon frère en croix
rien de ma sœur violée
rien
de l’outrage humain
rien de ces gens au regard glauque.
ces gens perdus
perclus de pierre atroce
rongés de nuit violente qui nous détache de la mort stère et nous attache au
printemps futur qui ose être en la ville chemin vers la lumière en marche
transgressée de silence de verte nuit du beau jardin de notre enfance de ce
nuage qui nous accable de ce matin sinistre qui nous blesse au visage et nous
rue de lenteur ivre sous la vieille potence
où
nous nous clamons coupables
en nos chansons de pierre noire de lune atroce de vigne en
sang de terre vaine et de moissons de blé au goût de laurier rose en nos
chansons de mort possible en nos ruelles en notre temps de sable où la couleur
s’évade du vieux chagrin qui tue les assassins de l’aube notre aube au long
venin qui encercla notre être de grand froid et nous laissa sans âtre dans la
steppe amère où nous étions sans armes.
*
par
quelle issue prendre le large et nous sauver très loin de nos chemins du vieux
silence que nous crevons parois afin de prendre la parole dresser notre
lumière et vaincre en notre humain supplice la mort qui nous afflige au long
de l’âge et nous éteint de sable aride
de nuit étanche et de venin étrange dont nous ne savions rien perdus comme
nous sommes
hagards
pour seule issue la mort la mort donnée la mort reçue la mort apprise dés
l’école la mort apprise à la caserne la mort pour le pouvoir l’argent ignoble
la mort pour le silence au coin de l’infâmie la mort pour inspirer la peur
l’abandon de soi même l’abandon de l’être et de l’avoir la mort pour infliger
l’horreur en faire un rite une habitude un quotidien de sang pour mettre fin à
notre vivre à notre espoir de vaincre honte misère et servitude par mille et
un moyens pour atteindre à l’humain.
04.
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*
l’humain se gagne au vieux combat que nous menons pour survivre au malheur que
l’on nomme destin pour endormir les gens hagards au masque de silence qui ne
savent plus où donner de la tête pour endormir les êtres éveillés tuer les
réfractaires nos spectres de passage en la ville qui bavarde à mourir là bas
hors de l’humain où l’on donne la parole au bureaucrate qui édifie sa propre
ruine et nous ignore en marge de sa mort fatale où la médiocrité s’incruste au
cœur de toute chose.
*
nous
en restons en deuil
*
en
deuil
du beau
solstice humain qui hante notre temps de grâce et de chansons.
*
poème
précieux poème
où nous gagnons un âtre qui nous rassemble en la chanson où l’homme avance
s’humanise et parle ô traces que je quête en marche vers la vie que
j’aime à mort à neige ouverte vers mon frère en peine d’astre à fleur issue de
nous de notre vigne blanche de nos raisins éclat nu de septembre au jour de
l’équinoxe où l’on me supplicie.
*
poème
précieux poème où
nous gagnons grain de raisin sonore malgré l’or qui nous emporte vers un hiver
de mort un havre en ce printemps où nous nous sommes retrouvés après l’errance
à travers ombre et croix sueur de sang de l’arbre qui nous garde en éveil
entre l’agneau et la colombe entre vivre mourir au chant du rossignol aux yeux
crevés d’avance en terre amère et violente qui nous hisse vers le plus clair
signal qui passe dans l’éclair et nous ramène au vivre incandescent où nous
nous sommes rencontrés.
*
poème
précieux poème en nous éclat de source dans la plaine intangible où nous
parlons de nous afin de mettre au clair le silence qui laisse en nous sa
charge d’ombre répugnante sa vieille pluie de rouille amère son dernier feu sa
haute tour où veille sentinelle atroce un nain.
*
mettre au clair le silence qui laisse en nous sa gerbe de laideurs qui hante
notre algèbre et nous accable de sa pauvre haine sa haine anachronique pétrie
de vieille peur apprise dans notre aube de cendre où nous parlions de nous
afin de mettre au clair la mort l’amour l’ancien mystère d’être encore lampe
d’argile dans la nuit malade cris de sorcière dans la clairière qui danse
espoir en ruine ancien mystère d’être encore la proie au labeur sans salaire
que le quignon de pain la boule de riz et la pincée de drogue amère qui dénoue
l’être pris au piège et mis en croix et nous ramène au monde impitoyable de la
chair martyre au vieux silence au ciel pris grisaille et ruine l’être qui orne
notre temps de sable et nous invente un âtre.
*
poème
précieux
poème en nous qui ne savions rien de la vie que ce besoin de présence de geste
et de parole en la couleur subtile où l’on s’arrête en arme surpris de rouille
amère et de violence face au miroir où sont entrés les miens que je nomme en
secret et que parfois j’appelle à mon secours afin que nous brûlions les
hyènes de l’horreur qui nous glace de mort face au miroir où sont tombés comme
des feuilles mortes dans l’étang de l’oubli les gens aimés au temps de la
lumière en marche dans l’histoire que je croyais fidèles à notre élan de
source vers l’avenir et qui ne me sont plus que transfuge sans être en ce
temps noir de brume où l’on privilégie le mystère sur la science où nous
parlons de nous dans le plus beau tumulte.
05
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*
mémoire cherche l’oubli dans la fuite en avant vers le risque concret de mort
et de tabous transis au cœur de notre marche hors de notre ténèbre qui saigne
à l’horizon des hommes sans visage qui ne savent plus rien du doute que l’on
sème dans la ville où nous nous regardons surpris d’orgueil et de méfiance en
ce que nous voyons
où nous gisons à terre
sans aide ni confiance en l’espoir redoutable qui passe à
portée de nos mains
où nous saignons sans yeux hors de l’étang noirâtre miroir
sans tain
miroir qui hante et culpabilise de haine sourde les hyènes les chacals les
écoliers les semeurs d’ombre ignoble les lécheurs de poison de venin de
crapaud que lèche le drogué ah drogués de tyrannie et de mystère misère de
notre temps
misère
nuit
sèche à l’horizon du pauvre
source
morte à l’approche des nains douleur de suie sueur sur les visages où
l’innocent du vieux silence en l’être transgresse les tables de la loi vaincue
et nous porte vers un ailleurs de songe larme durcie au gel de l’existence où
nous nous sommes pris de cris de chair martyre qui s’accagnarde sous la pluie
des sang qui nous ignore et retombe sur nous crucifiés sans parole qui
n’implorons personne de nous sauver de l’ombre de nos liens qui nous hante
d’exil de nostalgie furieuse et de douleur sans nom où l’on plie sous la
lourdeur qui nous torture de ciel noir.
*
ah ! que d’exils en notre source en nous au moindre geste qui nous
questionne et nous défie de trouver la réponse où l’on s’incarne à force
d’être à force de printemps possible en toute fleur humaine où passe une
espérance en toute fleur où nous passons auprès de l’aube en armes que nous
tissions là bas en notre amère angoisse.
*
où
sommes nous
brûlés par quel silence d’arbre où notre nuit s’écoule eau noire et solitaire
qui nous entraîne en feu de mort subite et traîne dans sa nuit de peur sa
hargne et largue bateau en partance notre plus vieil espoir : la vie.
*
ah
nef étrange !
où
l’on nous porte de ville en ville que nous troublons de cris de fous en quête
d’un asile contre le froid du monde alors que nous étions l’asile qui
hébergeait le pauvre le mendiant le malade l’errant sans âtre ni travail dans
la ville en croix et sans plus d’être que la mort.
*
et
maintenant
on
nous expulse vers l’horreur sans haine
vers
le mystère de n’être plus que ce vivre sans terre où nous errons dans
l’amertume d’être un outil sans emploi
on
nous expulse vers le désert la fin du monde où l’on nous cache en nos bunkers
cernés de cendre morte rongés de sable en plein hiver de glace aride où nous
nous éteignons parmi un tas de provisions de comprimés nutritifs que nous
suçons dans la grisaille monde d’effroi multiple sans astre ni soleil un monde
atroce un vieux délire enclos de simulacres d’existence où nous parlons de
neige noire de halte en halte en nos cavernes où nous trouvons parfois des
provisions mais nous n’avons plus d’avenir.
*
avenir
avenir
jadis nous connaissions ce cri vers la lumière : demain.
06
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*
dans
tes yeux de pervenche parole ouvrait sa porte à l’astre qui flamboie et
j’entrais déchiffrer le texte de la vie qui s’aime le texte de l’amour l’envie
d’éternité sans ombre que nous creusions en notre vieux désert de pierre et
d’eau précieuse que nous aimions en fête au grand soleil féroce que nous de
toute fibre humaine parole ouvre le cœur et jongle en notre vie prise en
flagrant délit de tatouage des hiéroglyphes de l’amour qui nous attise contre
haine et lois pédantes et livre au feu les corps que nous traînons de fête en
fête au soir où nous marchons la vieille nuit qui nous hisse dés l’aube où
nous prenons racines dans la lumière en croix.
parole ouvre la porte et nous entrons au grand palais du maître en siècle de
naufrage armés de la douceur future qui nous écorche et tue les chiens surpris
de rage ancrés dans la douleur où nous passons en armes de printemps subtils
parole où nous ouvrons la porte à l’astre qui flamboie et nomme l’arbre humain
terre à défendre des hyènes sanguinaires temple à sauver du feu qui erre en
nos pays parcourus d’ombre et de décombres parcourus sans parole par l’éternel
mourir pris de silence du vieux silence qui habite le peuple les êtres d’ombre
et de mystère les prolétaires les affamés qui vendent leurs organes enfants
sans reins sans yeux parqués dans les taudis de tous les coins du monde
prostitués de tous les âges de toute classe du gourbi au palais sexe et
intelligence docile force de travail que l’on exploite par la faim
bienfaitrice aumône grise jeûnez un jour sur deux pour que le maître reste au
pouvoir et serve un plus grand maître aux armes répugnantes qui nous gouverne
et porte en nous l’effroi.
*
on
nous contrôle
on
nous maîtrise
on
nous expulse de notre être
on
nous torture
on nous
fixe au malheur d’être un arbre en la ville un chien errant dans la campagne
morte sans domicile et sans travail un fou hors de l’asile sans camisole
chimique.
les
vrais fous sont ailleurs en nos signes de crue matinale et dans tes yeux ma
sœur tes yeux que je croyais perdus sans plus d’autre couleur que notre
absence d’être sans plus d’autre refuge que l’éternel mourir qui me prend à la
gorge en ce désert de plaies de lèpre de hautes céréales et de venin mortel
qui laisse en nous son froid et son délire à chaque message d’être où je
tremble d’effroi hostile au verbe vivre ombre dans l’ombre sous la terre où je
parle malgré la distance qui ne t’éloigne plus de moi mais te rapproche de mes
éclairs enfant libre des soirs proches du vivre simple où nous fûmes
heureux.
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à
Jean Sénac
07
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*
poètes !
pauvres
nous vivions la vie de tous les pauvres.
nous portions leur malheur comme un sac de charbon comme une herse et leur
espoir comme un drapeau de sang.
nous avions faim et soif de l’âge humain promis à notre enfance en droit
d’être chanson arbre au printemps multiple fenêtre ouverte où nous étions
l’appel errant de crête en crête au mépris de l’horreur qui pouvait advenir
air noir en la poitrine porteuse de beau temps air noir dans la maison promise
au feu du chamane intégriste air noir de démence qui multiplie l’aboi des
chiens des hyènes hypocrites des prédateurs et des prédicateurs de haine du
visage humain.
ah !
prédicateurs de mort inquisiteurs armés de religion amère pourrie de nains
cruels d’hypocrisie multiple au fruit de sel sur plaie de honte bue à l’aube
sclérose
de la
lumière un
arbre
saigne
sclérose
de la
chanson
un cri s’égorge
sclérose de la
douceur
lèpre au visage
*
j’écoute
grâce en
la mort qui nous abrite et nous habille pour la fête où nous signons lèpre au
visage l’acte qui nous enchaîne et nous garde en otages
là bas dans la prison de
sel
otages sans espoir de fuite que nous risquons à mort pour être entrer dans la
légende qui capte nos frissons de frayeur sans visage qui parcourt notre
moelle épinière et nous laisse gémir dans la caverne d’ombre au premier feu
natal hyène surprise en nuit de rage aveugle.
*
j’écoute
grâce en la mort qui nous abrite
et
noue
de long chagrin secret notre expérience d’arbre au vieux silence qui nous
engendre parmi les siens en notre vieil automne au ciel en transhumance de
nuages de cendre et de silence dans la nuit de vent qui nous répète ogres
bleus ogres blancs ogres rouges ogres d’ombre des contes de l’enfance où nous
étions surpris d’étranges tentacules fils de la mère ogresse qui nous rongeait
la moelle ce peu de vivre qui nous reste encore à luire contre l’ombre du loup
qui hurle à notre trace ombre du crime ignoble qui use notre sang et livre
corps et pensée au knout de l’intégriste inquisiteur qui masque la conscience
sacre la haine nous oublie sous terre dans la tanière où l’on nous ronge au
creux de la lumière aveugle qui nous égare les yeux bandés de nuit aride
espoir
face au dernier soleil.
08.-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
*
dans
l’étang vieux miroir au ciel d’ombre subtile
dans
la nuit des tyrans au creux de l’herbe sèche
nous
lancions au passage un nid de fleur de givre
au
cœur du long chagrin où nous dormions en marge
nous
étions sans visage au soir de neige en croix
et
nous cachions en nous au long de l’âge hirsute
la
pierre d’ombre en feu qui brûle en notre espoir
sa
nuit de herse triste où nous pleurions de joie
nous étions sans parole au soir de givre en peine
nous taisions nos désirs et nous restions otages
de
notre espoir en gerbe en la splendeur de vivre
au
long de l’âge en croix au jour de braise amère
nous étions sans parole au ciel de peine où germe
fleur de courage en l’âtre en nuit de siècle atroce
l’orage au soleil triste en nous de terre étrange
où
nous parlions de nous lampe d’argile en mains
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*
à
Monique Salomon -
09
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*
tu es partie !
l’ombre est restée à notre place
ombre plus morte que vive que le sang qui roule en notre
corps chargé d’horreur au goût de fleur mystique de nuit amère de laurier au
vieux silence amer où nous ne marchons plus.
*
tu es
partie !
l’ombre est restée à notre place
dans la
hantise d’être un arbre que le vent torture peur de mourir pour rien d’être
un chemin de honte ombre engourdie en plein essor de juste espoir en
armes.
*
tu es
partie !
l’ombre est restée à notre place
en terre au long courage d’astre en ville éteinte où
l’herbe crisse sous nos pas vers la lumière en peine vers l’arbre où l’on me
cloue face au pouvoir des nains face au pouvoir où mon peuple reste en otages
aspire au vieux soleil mais retrouve en plein jour le feu la danse autour du
feu de la caverne et l’ancien sacrifice qui nous protège encore des hyènes
sans chagrin du froid qui momifie les jours perclus de solitude
de peur vide
perclus
de nuit tangible de feu de feuilles mortes de neige coutumière qui nous amasse
en feu au creux de la misère en croix arbres où sont cloués les miens au
même cri de réfractaires les millions de jésus au même cri de réfractaires
punis par le plus beau miroir réfractaires au malheur
au
silence
face au pouvoir des nains.
*
réfractaires
au pain noir
au chant de flûte amer et nostalgique
réfractaires
au voyage en fumée narcotique
au vieil oubli de mort que nous taisons en notre espoir de grâce et de chanson
en l’ordalie de l’aube espoir encore nomade en notre amère algèbre en notre
cri de pierre en larmes en notre corps surpris de brume de neige éclose en la
verdure de mort atroce et d’entrailles humaines aux arbres du jardin mort
ignoble que nous taisons parmi la foule triste qui traîne son chagrin vers
quelle issue de laine au corps du pauvre qui scintille
et
tue
de
son éclat de mort
l’éclat de la jeunesse ardeur au vivre de printemps ductile
qui nous enlace de sa chanson en croix et de visages que rien n’altère de leur
strangulation morbide en leur hideur obscène abane demeure un cri que l’on
étouffe pas maurice reste en chemin parmi nos jours brûlés de lèpre odieuse la
nuit se farde mais ne trompe personne la nuit se prostitue sadoune laid tue un
colon de plus abdelkader crache au visage de son bourreau au regard de reptile
mokhtar ouvre le feu et tombe vaincu par le nombre mesli refuse en clair le
tribunal français christian n’enseigne plus le chant des marais à la
chorale
millions
ils sont millions de martyrs de sosies politiques de compagnons d’hiver et de
printemps en nous d’éclats de neige et de vendanges de récoltes d’or et de
travail au pain sanglant et de lumière noire sue les visages que l’on exploite
à fond de cale mineurs galériens sans visage enfants vieillis dans le silence
terre morte dans notre rougeoyante liesse où nous dansons là bas à l’horizon
des êtres de printemps fraternel qui se sont mis en tête au sortir de
l’enfance d’être places et chemins outre malheur et neige à boire outre
tenaille à vif et chalumeau hélicoptères et mort magie et science noire de
l’outrage humain dans l’ordalie de l’aube.
*
et
j‘en oublie
en peine d’astre où l’on broie la lumière en poudre de venin que le chamane
donne à boire à sa pauvre victime en luisantes pincées de neige sèche de suie
et de soleil d’étoile au front de la jeunesse en arme face au regard menteur
des gens de haine de chant que l’on entonne et de liqueur que l’on hume dans
un train en partance vers un pays d’éclat multiple et de légende alors que
nous étions sous terre
surpris d’être la terre même à cause de notre simple espoir qui ne signifie
plus que mort écho du ivre humain où nous nous sommes pris d’avance en pièges
de chagrin alors que nous avions à vivre.
*
et
nous payons
ce vivre en croix
en
pierre d’ombre atroce en notre échange de caverne de suie étrange qui se
raconte au long du temps où mort subite nous entrave et nous porte sans cesse
vers quelque ailleurs possible en notre marche contre l’oubli le vieil oubli
qui s’adonise et nous assiège encore.
*
et
j’en oublie
en notre histoire d’ombre acide rongeur qui tue en nos chemins perclus de
honte et de décombres le vieil espoir que l’on entrave pas et que nous
connaissions vengeur qui absterge la plaie que nous savons d’avance chemin qui
mène au cimetière où l’on inhume un astre dans la pierre d’ombre que nous
portions jadis comme un secret de loup.
*
et
nous payons
le droit d’être un bourgeon dans la lumière adulte
où nous
payons
l’air noir qui nous écorche
qui nous déchire et nous aspire vers l’abîme au vieil étang d’eau noire où
l’on déverse ordures et peine que nous buvons de peur du bureaucrate qui lâche
contre nous ses chiens son cri d’alerte frayeur en nos chemins de vieil
exil en notre plus beau rêve d’âtre.
*
et
nous payons
notre air
l’espoir qui nous habite
qui
nous déserte et nous laisse en la mort pourrir de lèpre anthropophage qui nous
insulte d’ombre au feu multiple où nous ne sommes rien sinon l’âpre refus
d’être la proie du crime qui s’organise de jour en jour l’âpre refus de
feindre enfin couleur humaine et grâce d’être en la douceur un havre où nous
payons le vieux silence appris au cours des âges de servage au temps de boue
où nous étions sans terre ni trace sur la terre sans âtre ni récolte et sans
espoir à vivre hors du sillon que le fouet laisse sur l’échine au long travail
de mort cri de coutume en notre état où nous restions de siècle en siècle
serfs de silence condamnés de grâce ivre de haine au songe sans éclat du
seigneur de l’instant notre maître en ce temps qui nous ruine d’effroi fouille
nos gènes clone esclave et soldat et nous laisse sans visage ni masque au
creux de notre pauvre vivre où nous payons d’avance l’amour l’éclair de feu
qui nous dénude hiver en l’âtre où nous veillons veilleurs au corps de braise
intense et salutaire griffe en la mort subtile griffe en la nuit morose éclat
qui nous consume d’ombre au creux de l’anse où nous entrons nous établir à
l’aise et vaincre la vermine atroce qui nous assiège de lumière noire où nous
pleurons parfois : ça nous arrive encore.
*
défiez vous du silence et du masque que nous portons en nous au seuil nocturne
des cavernes.
*
ça
pue la mort.
ça
pue
l’éclair qui nous arrache au crime qui nous hante encore d’arc en ciel sonore
où nous passons
en quête d’astre libre
en
quête de printemps à vivre contre les nains cruels pétris de science amère de
la torture pétris de nuit aveugle au cri d’espoir tenace
ça
pue
la peur qui passe dans les yeux des gens surpris de comprendre mon chant
l’écho de mon ivresse où la vieille pierre grise pleure une ombre de chagrin
en marche dans le temps dans l’instant éternel où nous parlons en clair du
vivre atroce qui porte en bandoulière un autre vivre un pauvre vivre humain
dans l’éternel mourir qui nous lave en chemin de notre vivre d’arbre où veille
notre enfance.
*
et
nous payons l’ancien silence
par temps de crime riche en volerie qui nous extorque : argent !
notre travail honneur ! le viol ignoble la boue infecte où l’on urine
dans la baignoire où nous buvons la mort la honte d’être ce vieil homme qui
peine dans la nuit sans armes de combat sans rien pour protéger sa vie la vie
des siens sans rien pour garder son avoir pour rester libre d’être en vie en
fuite la mort possible au creux de l’ombre dans l‘eau noire de l’étang secret
où ne descend pas une étoile pas un rayon de clair de lune pas un bougeoir de
solitude qui interroge l’ombre pas un seul cri pas une obole de lumière
rien.
*
et
nous payons l’ancien silence
car
nous avions besoin de paix et de travail et nous voulions narguer le maître en
nos défis la lie de toute espèce et les truands sans être les harkis sans
visage les chacals convertis en enfants la lie prenait racines en notre vivre
étrange et sans couleur et nous ne faisions rien au lieu où nous payons de
cris de neige notre fête réduite au silence la paix en fuite vers la mort sans
un seul cri de juste pour dénoncer l’horreur la suie sur le plus beau visage
qui se dénonce humain fou d’avenir et de récolte d’azur en l’ombre coloniale
et fou d’être un coin en chemin où l’on tue du regard.
*
et
nous payons
amers
les jours de vent stérile que la steppe cerne de sable et de rancœur contre la
ville où l’on égorge un homme dans le ruisseau qui roule vers l’égout le sang
et nous attire hors de notre aire et nous expulse du cercle humain où nous
n’avons plus de place et plus le droit de prendre la parole au nom des gens
perclus de mort brutale et du beau temps que nous portons en notre vivre en
nos élans vers la lumière que notre espoir assiège et garde comme un âtre qui
nous parle de son ancêtre le premier feu natal qui nous hante encore en notre
morne asile en notre longue marche contre le froid qui crisse sous nos pas en
nos élans d’éclairs de sang d’éclairs armés de foudre contre la nuit qui germe
en nos soirs de fatigue et nous répète en armes et nous conjugue et nous
garde
en amers
où nous nous préservons du naufrage que nous savons possible mais nous
marchons sous terre nous avançons de pays en pays nous rencontrons notre
multiple image qui s’arme de printemps précoce et nous raconte et nous
enseigne au monde
aux pauvres gens nus d’espérance comme en nos hivers les arbres nus de froid
dans la nuit sans remède.