(Source : http://page.infinit.net/histoire/refus-gl.html)
Présentation du manifeste Il y a un avant
et un après-9 août 1948, date de la parution de Refus global. Cette
section introductive s’intéresse donc d’abord à l’archéologie de cette
publication phare, aux avant-courriers de ce texte révolutionnaire, puis aux
détails de la double chronologie qui a marqué le mouvement automatiste et la
préparation comme telle du manifeste, dont le texte est à la fois reproduit
et analysé pour ses qualités littéraires intrinsèques. Les dernières
contributions suivent ensuite la fortune critique du texte, de décennie en
décennie, d’anniversaire de parution en commémoration, jusqu’à la
constitution progressive d’un véritable mythe québécois de Refus global,
qui fait de Borduas le héros culturel et idéologique du Québec moderne. |
Refus global
Rejetons de
modestes familles canadiennes-françaises, ouvrières ou
petites bourgeoises, de l’arrivée au pays à nos jours restées françaises et catholiques par
résistance au vainqueur, par attachement arbitraire au passé, par plaisir et
orgueil sentimental et autres nécessités.
Colonie précipitée
dès 1760 dans les murs lisses de la peur, refuge habituel des vaincus ;
là, une première fois abandonnée. L’élite
reprend la mer ou se vend au plus fort. Elle ne manquera plus de le faire chaque fois
qu’une occasion sera belle.
Un petit peuple
serré de près aux soutanes restées les seules dépositaires de la foi, du
savoir, de la vérité et de la richesse nationale. Tenu à l’écart de l’évolution
universelle de la pensée pleine de risques et de dangers, éduqué sans mauvaise
volonté, mais sans contrôle, dans le faux jugement des grands faits de l’histoire
quand l’ignorance complète est impraticable.
Petit peuple issu d’une colonie
janséniste, isolé, vaincu, sans défense conte l’invasion de toutes les
congrégations de France et de Navarre, en mal de perpétuer en ces lieux bénis
de la peur (c’est-le-commencement-de-la-sagesse !) le prestige et les
bénéfices du catholicisme malmené en Europe. Héritières de l’autorité papale,
mécanique, sans réplique, grands maîtres des méthodes obscurantistes, nos
maisons d’enseignement ont dès lors les moyens d’organiser en monopole le règne
de la mémoire exploiteuse, de la raison immobile, de l’intention néfaste.
Petit peuple qui malgré tut se multiplie
dans la générosité de la chair sinon dans celle de l’esprit, au nord de
l’immense Amérique au corps sémillant de la jeunesse au cœur d’or, mais à la
morale simiesque, envoûtée par le prestige annihilant du souvenir des
chefs-d’œuvre d’Europe, dédaigneuse des authentiques créations de ses classes
opprimées.
Notre destin sembla
durement fixé.
Des révolutions,
des guerres extérieures brisent cependant l’étanchéité du charme, l’efficacité
du blocus spirituel.
Des perles
incontrôlables suintent hors les murs.
Les luttes
politiques deviennent âprement partisanes. Le clergé conte tout espoir commet
des imprudences.
Des révoltes suivent,
quelques exécutions capitales succèdent. Passionnément les premiers ruptures
s’opèrent entre le clergé et quelques fidèles.
Lentement la brèche
s ’ é l a r g i t, se rétrécit,
s ’ é l a r g i t encore.
Les voyages à
l’étranger se multiplient. Paris exerce toute l’attraction. Trop étendu dans le
temps et dans l’espace, trop mobile pour nos âmes timorées, il n’est souvent
que l’occasion d’une vacance employée à parfaire une éducation sexuelle
retardataire et à acquérir, du fait d’un séjour en France, l’autorité facile en
vue de l’exploitation améliorée de la foule au retour. À bien peu d’exceptions
près, nos médecins, par exemple (qu’ils aient ou non voyagé) adoptent une
conduite scandaleuse (il-faut-bien-n’est-ce-pas-payer-ces-longues-années-d’études !).
Des œuvres révolutionnaires, quand
par hasard elles tombent sous la main, paraissent les fruits amers d’un groupe
d’excentriques.
L’activité académique a un autre prestige à notre manque de jugement.
Ces voyages sont
aussi dans le nombre l’exceptionnelle occasion d’un éveil. L’inviable
s’infiltre partout. Les lectures défendues se répandent. Elles apportent un peu
de baume et d’espoir.
Des consciences
s’éclairent au contact vivifiant des poètes maudits : ces hommes qui, sans
être des monstres, osent exprimer haut et net ce que les plus malheureux
d’entre nous étouffent tout bas dans la honte de soi et la terreur d’être
engloutis vivants. Un peu de lumière se fait a l’exemple de ces hommes qui
acceptent les premiers les inquiétudes présentes, si douloureuses, si filles
perdues. Les réponses qu’ils apportent ont une autre valeur de trouble, de
précision, de fraîcheur que les sempiternelles rengaines proposées au pays du
Québec et dans tous les séminaires du globe.
Les frontières de
nos rêves ne sont plus les mêmes.
Des vertiges nous
prennent à la tombée des oripeaux d’horizons naguère surchargés. La honte du
servage sans espoir fait place à la fierté d’une liberté possible à conquérir
de haute lutte.
Au diable le
goupillon et la tuque !
Mille fois ils
extorquèrent ce qu’ils donnèrent jadis.
Par-delà le
christianisme nous touchons la brûlante fraternité humaine dont il est devenu
la porte fermée.
Le règne de la peur
multiforme est terminé.
Dans le fol espoir
d’en effacer le souvenir je les énumère :
peur des préjugés — peur de l’opinion publique —
des persécutions — de la réprobation générale
peur d’être seul sans Dieu et la
société qui isole très infailliblement
peur de soi — de son frère — de
la pauvreté
peur de l’ordre établi — de la
ridicule justice
peur des relations neuves
peur du surrationnel
peur des nécessités
peur des écluses grandes
ouvertes sur la foi en l’homme — en la société future
peur de toutes les formes
susceptibles de déclencher un amour transformant
peur bleue — peur rouge — peur
blanche : maillons de notre chaîne.
Du règne de la peur
soustrayante nous passons à celui de l’angoisse.
Il aurait fallu
être d’airain pour rester indifférent à la douleur des partis pris de gaieté
feinte, des réflexes psychologiques des plus cruelles extravagances : maillot
de cellophane du poignant désespoir présent (comment ne pas crier à la lecture
de la nouvelle de cette horrible collection d’abat-jour faits de tatouages
prélevés sur de malheureux captifs à la demande d’une femme élégante ; ne
pas gémir à l’énoncé interminable des supplices des camps de
concentration ; ne pas avoir froid aux os à la description des cachots
espagnols, des représailles injustifiables, des vengeances à froid). Comment ne
pas frémir devant la cruelle lucidité de la science.
À ce règne de l’angoisse
toute-puissante succède celui de la nausée.
Nous avons été
écœurés devant l’apparente inaptitude de l’homme à corriger les maux. Devant
l’inutilité de nos efforts, devant la vanité de nos espoirs passés.
Depuis des siècles
les généreux objets de l’activité poétique sont voués à l’échec fatal sur le
plan social, rejetés violemment des cadres de la société avec tentative ensuite
d’utilisation dans le gauchissement irrévocable de l’intégration, de la fausse
assimilation.
Depuis des siècles
les splendides révolutions aux seins regorgeant de sève sont écrasées à mort
après un court moment d’espoir délirant, dans le glissement à peine interrompu
de l’irrémédiable descente :
les révolutions
françaises
la révolution russe
la révolution espagnole
avortée dans une
mêlée internationale, malgré les vœux impuissants de tant d’âmes simples du
monde.
Là encore, la
fatalité fut plus forte que la générosité.
Ne pas avoir la
nausée devant les récompenses accordées aux grossières cruautés, aux menteurs,
aux faussaires, aux fabricants d’objets mort-nés, aux affineurs, aux intéressés
à plat, aux calculateurs, aux faux guides de l’humanité, aux empoisonneurs des
sources vives.
Ne pas avoir la
nausée devant notre propre lâcheté, notre impuissance, notre fragilité, notre incompréhension.
Devant les
désastres de nos amours… En face de la constante préférence accordée aux chères
illusions conte les mystères objectifs.
Où est le secret de cette efficacité
de malheur imposée à l’homme et par l’homme seul, sinon dans notre acharnement à défendre la
civilisation qui préside aux destinées des nations dominantes.
Les États-Unis, la
Russie, l’Angleterre, la France, l’Allemagne, I’Italie et l’Espagne :
héritières à la dent pointue d’un seul décalogue, d’un même évangile.
La religion du
Christ a dominé l’univers. Voyez ce qu’on en a fait : des fois sœurs sont
passées à des exploitations sœurettes.
Supprimez les
forces précises de la concurrence des matières premières, du prestige, de
l’autorité et elles seront parfaitement d’accord. Donnez la suprématie à qui
vous voudrez, le complet contrôle de la terre à qui il vous plaira, et vous
aurez les mêmes résultats fonciers, sinon avec les mêmes arrangements des
détails.
Toutes sont au
terme de la civilisation chrétienne.
La prochaine guerre mondiale en
verra l’effondrement dans la suppression des possibilités de concurrence
internationale.
Son état
cadavérique frappera les yeux encore fermés.
La décomposition
commencée au XIVe siècle donnera la nausée aux moins sensibles.
Son exécrable exploitation,
maintenue tant de siècles dans l’efficacité au prix des qualités les plus
précieuses de la vie, se révélera enfin à la multitude de ses victimes :
dociles esclaves d’autant plus acharnés à la défendre qu’ils étaient plus
misérables.
L’écartèlement aura
une fin.
La décadence
chrétienne aura entraîné dans sa chute tous les peuples, toutes les classes
qu’elle aura touchées, dans l’ordre de la première à la dernière, de haut en
bas.
Elle atteindra dans
la honte l’équivalence renversée des sommet du XIIIe siècle.
Au XIIIe
siècle, les limites permises à l’évolution de la formation morale des relations
englobantes du début atteintes, l’intuition cède la premier place à la raison.
Graduellement, l’acte de foi fait place à l’acte calculé. L’exploitation commence
au sein de la religion par l’utilisation intéressée des sentiments existants,
immobilisés ; par l’étude rationnelle des textes glorieux au profit du
maintien de la suprématie obtenue spontanément.
L’exploitation
rationnelle s’étend lentement à toutes les activités sociales : un
rendement maximum est exigé.
La foi se réfugie
au cœur de la foule, devient l’ultime espoir d’une revanche, l’ultime
compensation. Mais là aussi, les espoirs s’émoussent.
En haut lieu, les
mathématiques succèdent aux spéculations métaphysiques devenues vaines.
L’esprit
d’observation succède a celui de transfiguration.
La méthode
introduit les progrès imminents dans le limité. La décadence se fait aimable et
nécessaire : elle favorise la naissance de nos souples machines au déplacement
vertigineux, elle permet de passer la camisole de force à nos rivières
tumultueuses en attendant la désintégration à volonté de la planète. Nos
instruments scientifiques nous donnent d’extraordinaires moyens
d’investigation, de contrôle des trop petits, trop rapides, trop vibrants, trop
lents ou trop grands pour nous. Notre raison permet l’envahissement du inonde,
mais d’un monde où nous avons perdu notre unité.
L’écartèlement
entre les puissances psychiques et les puissances raisonnantes est près du paroxysme.
Les progrès
matériels, réservés aux classes possédantes, méthodiquement freinés, ont permis
l’évolution politique avec l’aide des pouvoirs religieux (sans eux ensuite)
mais sans renouveler les fondements de notre sensibilité, de notre subconscient,
sans permettre la pleine évolution émotive de la foule qui seule aurait pu nous
sortir de la profonde ornière chrétienne.
La société née dans
la foi périra par l’arme de la raison :
l’INTENTION.
La régression
fatale de la puissance morale collective en puissance strictement individuelle
et sentimentale a tissé la doublure de l’écran déjà prestigieux du savoir
abstrait sous laquelle la société se dissimule pour dévorer à l’aise les fruits
de ses forfaits.
Les deux dernières
guerres furent nécessaires à la réalisation de cet état absurde. L’épouvante de
la troisième sera décisive. L’heure H du sacrifice total nous frôle.
Déjà les rats
européens tentent un pont de fuite éperdue sur l’Atlantique. Les événements
déferleront sur les voraces, les repus, les luxueux, les calmes, les aveugles,
les sourds.
Ils seront culbutés
sans merci.
Un nouvel espoir
collectif naîtra.
Déjà il exige
l’ardeur des lucidités exceptionnelles, l’union anonyme dans la foi retrouvée
en l’avenir, en la collectivité future.
Le magique butin
magiquement conquis à l’inconnu attend à pied d’œuvre. Il fut rassemblé par
tous les vrais poètes. Son pouvoir transformant se mesure à la violence exercée
contre lui, à sa résistance ensuite aux tentatives d’utilisation (après plus de deux siècles, Sade reste introuvable en
librairie ; Isidore Ducasse, depuis plus d’un siècle qu’il est mort, de
révolutions, de carnages, malgré l’habitude du cloaque actuel reste trop viril
pour les molles consciences contemporaines).
Tous les objets du
trésor se révèlent inviolables par notre société. Ils demeurent l’incorruptible
réserve sensible de demain. Ils furent ordonnés spontanément hors et contre la
civilisation. Ils attendent pour devenir actifs (sur le plan social) le
dégagement des nécessités actuelles.
D’ici là notre
devoir est simple.
Rompre
définitivement avec toutes les habitudes de la société, se désolidariser de son
esprit utilitaire. Refus d’être sciemment au-dessous
de nos possibilités psychiques et physiques. Refus
de fermer les yeux sur les vices, les duperies perpétrées sous le couvert du
savoir, du service rendu, de la reconnaissance due. Refus d’un cantonnement dans la seule bourgade plastique,
place fortifiée mais trop facile d’évitement. Refus
de se taire, — faites de nous ce qu’il vous plaira mais vous devez nous
entendre — Refus de la gloire, des honneurs
(le premier consenti) : stigmates de la nuisance, de l’inconscience, de la
servilité. Refus de servir, d’être
utilisable pour de telles fins. Refus de toute INTENTION, arme néfaste de la RAISON.
À bas toutes deux, au second rang !
PLACE À LA
MAGIE !
PLACE AUX
MYSTÈRES OBJECTIFS !
PLACE À L’AMOUR !
PLACE AUX NÉCESSITÉS !
Au refus global nous opposons la
responsabilité entière.
L’action intéressée
reste attachée à son auteur, elle est mort-née.
Les actes
passionnels nous fuient en raison de leur propre dynamisme.
Nous prenons
allègrement l’entière responsabilité de demain. L’effort rationnel, une fois
retourné en arrière, il lui revient de dégager le présent des limbes du passé.
Nos passions façonnent
spontanément, imprévisiblement, nécessairement le futur.
Le passé dut être
accepté avec la naissance, il ne saurait être sacré. Nous sommes toujours
quittes envers lui.
Il est naïf et malsain de considérer
les hommes et les choses de l’histoire dans l’angle amplificateur de la
renommée qui leur prête des qualités inaccessibles à l’homme présent. Certes, ces qualités sont
hors d’atteinte aux habiles singeries académiques, mais elles le sont
automatiquement chaque fois qu’un homme obéit aux nécessités profondes de son
être ; chaque fois qu’un homme consent à être un homme neuf dans un temps
nouveau. Définition de tout homme, de tout temps.
Fini l’assassinat
massif du présent et du futur à coups redoublés du passé.
Il suffit de
dégager d’hier les nécessités d’aujourd’hui. Au meilleur demain ne sera que la
conséquence imprévisible du présent.
Nous n’avons pas à
nous en soucier avant qu’il ne soit.
* * *
RÈGLEMENT FINAL DES COMPTES
Les forces
organisées de la société nous reprochent notre ardeur à l’ouvrage, les
débordement de nos inquiétudes, nos excès comme une insulte à leur mollesse, à
leur quiétude, à leur bon goût pour ce qui est de la vie (généreuse, plein
d’espoir et d’amour par habitude perdue).
Les amis du régime
nous soupçonnent de favoriser la « Révolution ». Les amis de la
« Révolution » de n’être que des révoltés : « … nous
protestons contre ce qui est, mais dans l’unique désir de le transformer, non
de le changer. »
Si délicatement dit
que ce soit, nous croyons comprendre.
Il s’agit de classe.
On nous prête
l’intention naïve de vouloir « transformer » la société en remplaçant
les hommes au pouvoir par d’antres semblables. Alors, pourquoi pas eux,
évidemment !
Mais c’est qu’eux
ne sont pas de la même classe ! Comme si changement de classe impliquait
changement de civilisation, changement de désirs, changement d’espoir !
Ils se dévouent à
salaire fixe, plus un boni de vie chère, à l’organisation du prolétariat ;
ils ont mille fois raison. L’ennui est qu’une fois la victoire bien assise, en
plus des petits salaires actuels, ils exigeront sur le dos du même prolétariat,
toujours, et toujours de la même manière, un règlement de frais supplémentaires
et un renouvellement à long terme, sans discussion possible.
Nous reconnaissons
quand même qu’ils sont dans la lignée historique. Le salut ne pourra venir
qu’après le plus grand excès de l’exploitation.
Ils seront cet
excès.
Ils le seront en
toute fatalité sans qu’il y ait besoin de quiconque en particulier. La ripaille
sera plantureuse. D’avance nous en avons refusé le partage.
Voilà notre
« abstention coupable ».
À vous la curée
rationnellement ordonnée (comme tout ce qui est au sien affectueux de la
décadence) ; à nous l’imprévisible passion ; à nous le risque total
dans le refus global.
(Il est hors de volonté
que les classes sociales se soient succédé au gouvernement des peuples sans
pouvoir autre chose que poursuivre l’irrévocable décadence. Hors de volonté que
notre connaissance historique nous assure que seul un complet épanouissement de
nos facultés d’abord, et ensuite, un parfait renouvellement des sources
émotives puissent nous sortir de l’impasse et nous mettre dans la voie d’une
civilisation impatience de naître.)
Tous, gens en
place, aspirants en place, veulent bien nous gâter, si seulement nous consentions
à ménager leurs possibilités de gauchissement par un dosage savant de nos
activités.
La fortune est à nous si nous
rabattons nos visières, bouchons nos oreilles, remontons nos bottes et
hardiment frayons dans le tas, à gauche, à droite.
Nous préférons être
cyniques spontanément, sans malice.
* * *
Des gens aimables
sourient au peu de succès monétaire de nos expositions collectives. Ils ont
ainsi la charmante impression d’être les premiers à découvrir leur petite
valeur marchande.
Si nous tenons exposition
sur exposition, ce n’est pas dans l’espoir naïf de faire fortune. Nous savons
ceux qui possèdent aux antipodes d’où nous sommes. Ils ne sauraient impunément
risquer ces contacts incendiaires.
Dans le passé, des
malentendus involontaires ont permis de telles ventes.
Nous croyons ce
texte de nature à dissiper tous ceux de l’avenir.
Si nos activités se
font pressantes, c’est que nous ressentons violemment l’urgent besoin de
l’union.
Là, le succès
éclate !
Hier, nous étions
seuls et indécis.
Aujourd’hui un
groupe existe aux ramifications profondes et courageuses ; déjà elles
débordent les frontières.
Un magnifique
devoir nous incombe aussi : conserver le précieux trésor qui nous échoit.
Lui aussi est dans la lignée de l’histoire.
Objets tangibles,
ils requièrent une relation constamment renouvelée, confrontée, remise en
question. Relation impalpable, exigeante qui demande les forces vives de
l’action.
Ce trésor est la
réserve poétique, le renouvellement émotif où puiseront les siècles à venir. Il
ne peut être transmis que TRANSFORMÉ, sans quoi c’est le
gauchissement.
Que ceux tentés par
l’aventure se joignent à nous.
Au terme
imaginable, nous entrevoyons l’homme libéré de ses chaînes inutiles, réaliser
dans l’ordre imprévu, nécessaire de la spontanéité, dans l’anarchie
resplendissante, la plénitude de ses dons individuels.
D’ici là, sans
repos ni halte, en communauté de sentiment avec les assoiffés d’un mieux-être,
sans crainte des longues échéances, dans l’encouragement ou la persécution,
nous poursuivrons dans la joie notre sauvage besoin de libération.
Paul Émile BORDUAS
Magdeleine ARBOUR,
Marcel BARBEAU, Bruno CORMIER, Claude GAUVREAU, Pierre GAUVREAU, Muriel
GUILBEAULT, Marcelle FERRON-HAMELIN, Fernand LEDUC, Thérèse LEDUC, Jean-Paul
MOUSSEAU, Maurice PERRON, Louise RENAUD, Françoise RIOPELLE, Jean-Paul
RIOPELLE, Françoise SULLIVAN.